La thématique Santé publique inclut à la fois l’ensemble des disciplines scientifiques qui concourent à la recherche clinique et en santé publique et des axes de recherche transversaux et prioritaires par rapport aux questions contemporaines de santé.
La thématique Santé publique inclut à la fois l’ensemble des disciplines scientifiques qui concourent à la
recherche clinique et en
santé publique
(épidémiologie, biostatistique, économie et sociologie appliquées au
domaine de la santé, toxicologie environnementale, méthodologie de la
recherche clinique) et des axes de recherche transversaux et
prioritaires par rapport aux questions contemporaines de santé :
développement de la recherche clinique dans des domaines peu ou pas
couverts par la recherche pharmaceutique, relations
santé-environnement-travail, handicaps et incapacités, analyse et
évaluation du fonctionnement du système de santé, santé publique dans
les pays en développement.
Au sein de l’Union européenne, la France jouit d’une situation plutôt enviable du point de vue de la santé de sa population.
Elle se place en quatrième position pour l’
espérance de vie à la naissance (78 ans en moyenne) et en première position pour l’
espérance de vie à 65 ans
(16 ans pour les hommes, 20 ans pour les femmes). La France a le taux
le plus faible de mortalité cardiovasculaire. La mortalité est également
très faible en dessous de 15 ans, et la mortalité infantile en
particulier a été diminuée de moitié au cours des sept dernières années.
Sur le long terme,
des tendances positives
sont observées : déclin régulier de la mortalité liée aux maladies
cardiovasculaires, aux chutes chez les personnes âgées, au sida (grâce
aux trithérapies), au syndrome de mort subite du nourrisson. La qualité
de vie des personnes les plus âgées a été améliorée par la
généralisation de certaines interventions, comme la chirurgie de la
cataracte ou la pose de prothèses auditives. Ces progrès ne sont pas
étrangers au fait qu’un effort financier significatif est consenti pour
la santé (10 % du PNB).
À côté de ces résultats positifs, des
faiblesses évidentes apparaissent dans notre situation sanitaire. Ainsi, le nombre de
décès prématurés évitables
(avant 65 ans) est élevé par rapport à nos voisins, en lien notamment
avec les niveaux de consommations de tabac et d’alcool dans la
population générale. Cette mortalité prématurée diminue l’espérance de
vie globale et repose la question de l’
insuffisance de prévention primaire dans notre pays. Malgré des choix sociaux et politiques orientés sur l’égal accès aux soins, les
inégalités de santé
au sein de la population sont encore manifestes entre sexes, régions et
professions. Ainsi, l’espérance de vie des femmes (82,7 ans) reste plus
élevée que celle des hommes (75,2 ans), bien que l’on observe un
rapprochement tendanciel. Les inégalités socio-économiques sont
importantes : à 35 ans, un ouvrier non qualifié a trente-huit ans
d’espérance de vie en moyenne contre quarante-quatre ans pour un cadre.
Les disparités régionales sont également prononcées, puisqu’un habitant
de la région Midi-Pyrénées a une espérance de vie de 76 ans contre 71
ans pour un habitant du Nord-Pas-de-Calais.
Ces phénomènes s’expliquent par divers facteurs, au nombre desquels on compte certaines orientations de la
politique de la santé publique.
Depuis la Seconde Guerre mondiale, le soin est considéré comme le
pilier quasi exclusif de notre système de santé. Or, il apparaît que les
démarches de prévention - représentant seulement 7 % de nos dépenses de
santé - pourraient jouer un rôle fondamental pour améliorer nos
indicateurs de santé, à côté des démarches classiques de soin.
D’ailleurs, les inégalités de santé que l’on observe reposent plus sur
des inégalités d’
accès à la prévention que sur des inégalités d’accès aux soins.
L’une des vocations de la recherche en santé publique
est d’apporter aux décideurs et acteurs du système de santé (ministère
de la santé, autorités de santé, gestionnaires du système de soin,
régimes d’assurance-maladie, professionnels, associations de malades,…)
tous les éléments factuels et théoriques de nature à faciliter leurs
choix.
Cela nécessite la mise en œuvre de travaux de recherche de diverses natures permettant d’analyser les déterminants de la santé, à travers trois niveaux d’analyse :
- les dimensions individuelles (influence des caractéristiques
personnelles généralement inscrites dans le substrat biologique et des
comportements des individus sur leur santé) ;
- les dimensions environnementales (influence des produits industriels
rares ou de consommation courante, des produits alimentaires, de la
pollution, des médicaments, etc.) ;
- les dimensions organisationnelles et institutionnelles (relevant
directement du système de soins lui-même, de ses choix stratégiques et
de son usage par la population).
Certaines de ces analyses nécessitent la mise en œuvre d’études portant
sur une population nombreuse (statistiquement représentative de ce que
l’on veut analyser), appelées
études de cohorte. À titre d’exemple, la
cohorte ELFE, représentative au plan national, rassemblera
20 000 enfants nés en 2010
qui seront suivis de la naissance à l’âge adulte, dans une approche
pluridisciplinaire. Elle constituera donc à terme une source
irremplaçable de données permettant de comprendre le développement de
l’enfant dans son milieu, avec le souci d’étudier les différents
facteurs en interaction tout au long du parcours jusqu’à l’âge adulte
(facteurs biologiques, familiaux, sociaux, environnementaux, scolaires,
comportementaux, sanitaires, nutritionnels) et de comprendre l’impact
des situations traversées durant l’enfance sur la santé, le
développement physique, psychologique, social et professionnel des
personnes.
On conçoit aisément toute l’importance des
enquêtes épidémiologiques et des
analyses de santé publique
de ce type. Sans elles, nous serions privés de l’information
essentielle à nos choix de vie et de société, une information d’autant
plus indispensable que nous évoluons dans un environnement complexe en
mutation rapide. Il a, par exemple, fallu attendre 1956 pour que soit
mis au jour pour la première fois le lien statistique entre tabagisme et
cancer du poumon grâce à un protocole d’enquête épidémiologique portant
sur un très grand nombre de sujets, alors que la consommation de tabac
avait commencé quelques siècles plus tôt en Europe ! Les citoyens
expriment aujourd’hui une préoccupation forte pour leur santé, pour la
compréhension de tous ses déterminants et pour l’efficacité des choix
publics en ce domaine.
Quelle stratégie scientifique privilégier ?
L’analyse du potentiel de recherche conduite ces derniers mois par l’institut Santé publique met en relief un certain nombre d’
atouts de la recherche clinique et en santé publique françaises
: pluridisciplinarité en développement dans beaucoup d’équipes,
proximité de l’interface entre production des connaissances et
intervention qui place la recherche clinique et la recherche en santé
publique au cœur des décisions cliniques et de l’élaboration des
politiques de santé, réelles qualités d’expertise présentes dans les
équipes.
En contrepoint, l’analyse souligne également des faiblesses aujourd’hui
bien identifiées car elles sont vécues au quotidien par l’ensemble des
chercheurs du champ mais aussi par les utilisateurs de la recherche en
santé publique :
le relatif émiettement des forces qui
nuit à la visibilité nationale et internationale des recherches mais
aussi à la capacité de mobilisation des équipes sur des risques
sanitaires émergents, des
interactions encore insuffisantes
entre approches fondamentales, cliniques, en sciences humaines et
sociales et en santé publique nécessaires pourtant à une
compréhension intégrée des différents facteurs qui interviennent dans
l’état de santé de la population.
© Inserm, P. Latron
Examen écho-Doppler de l'artère brachiale pour l'étude de la fonction
endothéliale. Laboratoire de pathologies cardiovasculaires du centre
d'investigation clinique 9501, hôpital Jeanne d'Arc, Nancy.
C’est en regard de ces constats que l’institut Santé publique a placé comme première priorité de son action le
soutien au développement de ce que l’on appelle aujourd’hui
"les grandes infrastructures de recherche"
dans le champ de la clinique et de la recherche en santé publique. Il
s’agit concrètement de grands dispositifs d’études observationnelles
comme la cohorte ELFE déjà citée et qui sont l’équivalent - en recherche
clinique et en santé publique - de ce que sont les grands télescopes en
astronomie, à savoir : des observatoires de longue durée de l’évolution
de la santé d’une population donnée avec le recueil de tous les
facteurs susceptibles d’expliquer cette évolution. Ces infrastructures
constituent une puissante incitation au regroupement des équipes de
recherche autour d’elles. En effet, elles génèrent une très grande
quantité de données de qualité qui appellent des analyses variées et
approfondies qu’un seul groupe de recherche ne peut mener à bien. Elles
représentent également une incitation au développement d’approches
interdisciplinaires, notamment entre fondamentalistes, cliniciens,
épidémiologistes et équipes en sciences humaines et sociales compte tenu
du caractère multidimensionnel des données collectées au fil du temps.
Sur le plan thématique, l’institut Santé publique souhaite faciliter le
développement de recherches dans des domaines où les connaissances
doivent être augmentées et élargies en regard des enjeux sanitaires
sous-jacents. C’est le cas des relations entre
la santé et l’environnement
en lien avec la multiplication des produits industriels dans notre
environnement quotidien et de la dégradation globale de nos écosystèmes.
C’est le cas également du champ du
handicap et des
incapacités
dont l’importance ne peut que croître avec le vieillissement de la
population et l’accroissement des maladies chroniques génératrices de
handicaps divers.
Par ailleurs, il n’existe pas suffisamment de recherches réalisées en
France sur le fonctionnement et la gestion du système de santé, les
politiques publiques, sans oublier le domaine de la prévention par
comparaison avec l’état de l’art à l’étranger. L’institut Santé publique
a donc la responsabilité de
stimuler le développement de travaux de recherche dans ces différents domaines en veillant à favoriser des approches interdisciplinaires des sujets abordés.
Fonctionnement du système de santé
Ce domaine de recherche (baptisé
Health Services Research dans
les pays anglo-saxons) met en relation le fonctionnement des services de
santé et la production de santé.Il concerne les besoins, la demande et
l’offre sanitaire, ainsi que les structures, les acteurs, les procédures
et l’évaluation du système de santé, dans les domaines de la
prévention, du diagnostic et de la prise en charge des pathologies.
Au niveau global, cet axe de recherche concerne l’
organisation du système de santé et la définition de la stratégie
(politiques de santé, programmes, conditions d’élaboration et de mise
en œuvre, etc.). Au niveau local, il s’agit de comprendre les modes
d’organisation du système de santé et d’accès pour les usagers, les
modalités d’arbitrage, la question du comportement des acteurs. L’un des
objectifs de ce courant de recherche est d’apporter des éléments
d’appréciation utiles aux responsables de la planification sanitaire
dans l’allocation des ressources.
Politiques publiques et santé
L’ensemble des politiques publiques, même si elles ne concernent pas
directement les thématiques sanitaires, peuvent avoir des effets directs
ou indirects sur la santé. On doit donc s’interroger sur la façon dont
les politiques publiques, les modes d’organisation sociale et les
institutions qui en découlent sont susceptibles d’avoir un impact
(positif ou négatif) sur les populations. On peut également, à partir de
connaissances sur l’état de santé de la population, s’interroger sur la
façon dont les politiques publiques existantes sont adéquates ou non.
Prévention et politiques de prévention
Compte tenu du niveau encore élevé de la mortalité prématurée évitable
en France (décès avant 65 ans), l’institut Santé publique souhaite
favoriser des recherches cliniques et en santé publique dans deux
domaines où les risques pour la santé sont étroitement reliés à des
comportements individuels et collectifs : le domaine de la prévention
des conduites d’abus et de dépendance aux
drogues (tabac, alcool, cannabis principalement) ; celui de la
nutrition
et de l’éducation nutritionnelle en regard de l’augmentation continue
de la prévalence du surpoids et de l’obésité dans la population
française et de ses conséquences prévisibles sur la morbidité et la
mortalité.