samedi 17 mai 2014

Victoire écologiste après 6 mois de blocage d'une décharge dans l'Orne

Argentan (France) - Après 202 journées de blocage, les écologistes ont remporté une première victoire mercredi en obtenant de la justice la fermeture de la décharge ouverte par la société de recyclage GDE à proximité du prestigieux haras du Pin en Normandie.
Au terme d'une audience de plus de six heures dans la nuit de mardi à mercredi, le tribunal correctionnel d'Argentan a donné raison à deux organisations écologistes en estimant que GDE avait entreposé illégalement des morceaux de pneus dans cette décharge située à Nonant-le-Pin (Orne).
GDE a annoncé son intention de faire appel.
«C'est une grande bataille gagnée même si on n'est pas au bout de la guerre», a déclaré à l'AFP Noëlle Sandoz, présidente de Nonant Environnement, l'une des associations qui bloquent les accès à la décharge depuis fin octobre avec une vingtaine de personnes présentes en permanence. La question de la levée du blocage est désormais «en train de se poser», a-t-elle dit.
Ouverte légalement le 22 octobre 2013, la décharge n'a été exploitée que deux jours avant d'être bloquée par des opposants qui disent redouter la pollution de terres de réputation internationale pour l'élevage équin.
Les deux associations France nature environnement (FNE) et le Centre national d'information indépendante sur les déchets (Cniid), qui poursuivaient GDE, ont obtenu que la société soit condamnée à leur verser une amende de 10.000 euros.
Pendant l'audience, des morceaux de pneus, certains mesurant un mètre et récupérés sur place par des huissiers de justice, ont été montrés au tribunal, alors que selon la loi, les pneumatiques doivent faire l'objet d'un recyclage spécifique.
Alexandre Faro, l'avocat de FNE, a accusé GDE d'avoir intentionnellement entreposé ces morceaux de pneus pour des raisons économiques: broyer les carcasses d'automobiles sans ôter les pneumatiques au préalable, ce qui entraîne des coûts de main d'oeuvre.
- 1.856 tonnes entreposées en deux jours -
En réponse, l'avocat de GDE, Louis-Narito Harada, a reconnu la présence de «quelques résidus de pneumatiques» mais expliqué que les techniques actuelles ne permettaient pas de séparer ces déchets des carcasses d'automobiles.
GDE a fait part de sa«stupéfaction» à l'égard de ce jugement «incompréhensible».
«Nous allons continuer de travailler et de nous battre pour démontrer que notre site est en tout point conforme à la réglementation, en tout point exemplaire et nous sommes convaincus que nous obtiendrons gain de cause», a déclaré dans un communiqué Guillaume Dauphin, membre du directoire de GDE.
L'avocat de France nature environnement a souligné que l'entreprise avait déjà fait, à trois reprises, l'objet de mises en demeure depuis 2009 exactement pour le même problème d'entreposage de déchets de pneus sur ses sites.
Mme Sandoz, de Nonant environnement, a estimé que le jugement «ouvre un boulevard» à la ministre de l'Ecologie Ségolène Royal, qui peut selon elle désormais s'appuyer sur des éléments juridiques pour suspendre l'autorisation administrative d'exploiter attribuée en 2011 à GDE.
En février, le préfet de l'Orne a mis en demeure l'entreprise de retirer les 1.856 tonnes de déchets entreposés pendant les deux journées d'exploitation du site. GDE a contesté cet arrêté préfectoral.
La décharge devait recueillir quelque 2,34 millions de tonnes de déchets industriels en 17 années d'exploitation. Basé à Rocquancourt (Calvados), GDE se présente comme un des leaders du recyclage en France, avec plus de 80 sites.
Le jugement a été salué par des politiques de gauche comme de droite.
«C'est une excellente nouvelle et une grande victoire de la résistance des citoyens», s'est félicitée l'eurodéputée Karima Delli, tête de liste Europe Ecologie dans la circonscription nord-ouest.
«J’avais déclaré qu’il fallait résister et sortir les fourches et les faux. Je suis heureux que le combat mené avec pugnacité face à la bêtise et l’injustice l’ait emporté», a estimé le député de l'Eure Hervé Morin.

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