Des villes qui s'engagent dans le 100% énergies renouvelables, des entreprises qui demandent un prix carbone, voire l'intègrent à leur comptabilité interne, des banquiers qui s'engagent à décarboner leurs portefeuilles, des pays qui s'associent pour accélérer la R&D sur les technologies bas carbone... "Beaucoup
de choses se sont passées à côté de l'accord et jamais une COP n'avait
été accompagnée d'un tel foisonnement d'initiatives, soulignait Matthieu Orphelin, porte-parole de la Fondation Nicolas Hulot (FNH), le 12 décembre, ajoutant : Les acteurs sont en train de basculer vers le nouveau monde". Un avis unanimement partagé. "L'un des progrès de cette COP est l'engagement des acteurs non-étatiques", analysait Hertmann Ott, de l'institut de recherche pour le climat Wuppertal.
Les deux semaines au Bourget auront en effet permis de confirmer ce que
de nombreux observateurs pressentaient ces derniers mois : la transition
vers une économie bas carbone est sur le point de devenir une réalité.
Philippe Desfossés, directeur du fonds de pension public Erafp, compare
ce qu'il s'est passé pendant la COP à la tectonique des plaques : si le
changement est long, lorsqu'il se produit, ses effets sont soudains.
La dynamique des acteurs non-étatiques aurait ainsi facilité la
recherche d'un accord ambitieux, et notamment l'inscription de
l'objectif de 1,5°C, qui n'était pas acquise dans les premiers jours de
la COP. Tous ont souligné le momentum, Laurent Fabius a même parlé d'"alignement des planètes"…
Mais cette dynamique devrait surtout permettre d'accélérer l'atteinte des objectifs qui ont été fixés ce 12 décembre, voire de les dépasser. Et surtout, de ne pas attendre 2020, date d'entrée en vigueur de l'accord, pour agir. A condition que ce mouvement ne s'essouffle pas, et que les engagements soient transformés en actes.
Des engagements pour accélérer l'atteinte des objectifs
Un mois avant l'ouverture de la COP, le secrétariat général de la Convention cadre des Nations unies sur le changement climatique (Ccnucc) alertait les Etats : les engagements nationaux pour le climat (INDC) ne permettent pas d'être sur une trajectoire limitant la hausse des températures à 2°C. Une décision, rattachée à l'accord et adoptée samedi, "note avec préoccupation" que le compte n'y est pas et que "des efforts de réduction des émissions beaucoup plus importants" seront nécessaires.
"Il y a un gap entre les INDC et l'objectif de 2°C, et encore plus avec celui de 1,5 °C. Les acteurs non-étatiques peuvent jouer un rôle en renforçant les actions d'atténuation", estime Ronan Dantec, porte-parole de l'organisation mondiale des villes et chef de file des acteurs non-étatiques.
Une analyse partagée par Lukas Hermville, chercheur à l'institut Wuppertal : "Le processus des INDC a permis d'accélérer les actions des Etats et la mise en place d'agendas politiques dans certains pays, mais cela n'est pas suffisant".
En additionnant les INDC, il y aurait, selon les estimations de la Fondation Nicolas Hulot (FNH), 15 GteCO2 émises en trop en 2030. Or, en marge de la COP, 700 maires se sont engagés à réduire leur empreinte carbone de 3,7 Gt, le potentiel des engagements des grandes entreprises dans le cadre de l'Agenda des solutions Lima-Paris est estimé entre 2,7 et 3,1 Gt… "Mais attention à ne pas additionner ces engagements avec ceux des Etats, cela peut les concrétiser ou les accélérer, mais pas s'y ajouter", prévient Matthieu Orphelin, porte-parole de FNH. De nombreux acteurs appellent à construire une méthodologie pour pouvoir prendre en compte ces engagements, les suivre et les évaluer.
Les Etats devront pousser la dynamique
Mais pour que ces engagements se concrétisent, les acteurs doivent recevoir les bons signaux. Le premier, envoyé par l'adoption de l'accord de Paris, est primordial. "Cela va imposer une norme : 2°C, qui guidera les Etats, mais aussi les comportements de tous les acteurs, analyse Lukas Hermville, du Wuppertal institute. Car finalement, ce sont les systèmes socio-économiques qui doivent changer". Le fait d'inscrire l'idéal de 1,5°C dans l'accord envoie un message encore plus fort : "Beaucoup d'acteurs privés ont compris qu'être plus ambitieux était une question de compétitivité", estime le directeur du fonds de pension Erafp.
Mais cet élan ne sera hélas pas suffisant : "Nous avons besoin que cette ambition soit traduite aux échelons nationaux", avertit Sandrine Dixson-Declève, directrice du Corporate Leaders Group. L'attentisme pourrait être de mise… et notamment si l'engagement financier des Etats ne se concrétise pas. "Amenez les milliards, nous amènerons les trillions", lançait Nigel Topping, directeur général de We mean business, coalition qui rassemble quelque 500 entreprises et investisseurs.
"Nous nous félicitons de la présence de chapitres très opérationnels pour renforcer l'action sans tarder, par exemple pour la période 2015-2020, avec des dispositifs d'expertise et d'échange auxquels nous collaborerons activement", a déclaré de son côté Ronan Dantec, lors de la session de fermeture de la COP 21. Selon lui, l'accord a créé le cadre pour que "chacun fasse sa part". En revanche, il a souligné, comme le secteur privé, le nécessaire engagement financier des Etats et le besoin de flécher ces milliards vers les territoires : "Sans approche territoriale, nous ne tiendrons aucun des objectifs que la communauté internationale se fixe ce soir, sur l'adaptation comme sur l'atténuation", a-t-il averti. Une décision adoptée samedi encourage les Etats "à œuvrer étroitement avec les entités non parties, afin de favoriser le renforcement des activités d'atténuation et d'adaptation"…
Sophie Fabrégat, journaliste
Un rendez-vous annuel jusqu'en 2020
Les ministres de l'environnement du Pérou
(hôte de la COP 20), de la France (hôte de la COP 21) et du Maroc (hôte
de la COP 22) se sont engagés à poursuivre la dynamique de l'agenda des
solutions jusqu'à la prochaine COP, voire au-delà. "Un travail a démarré avec l'ONU, la Ccnucc, sur le pilotage et le calendrier", a annoncé Ségolène Royal.
A chaque COP, sur la période 2016-2020, une réunion de Haut niveau sera organisée avec des représentants des Etats, d'organisations internationales mais aussi des acteurs non-étatiques. Deux "champions" seront nommés par les Nations unies pour animer ces travaux. Elle sera l'occasion "de dresser le bilan des progrès réalisés et [de] prendre en compte les activités, initiatives et coalitions volontaires, nouvelles ou renforcées", précise une des décisions de l'accord. En attendant, les acteurs sont invités à enregistrer leurs initiatives et engagements sur le portail Nazca. Enfin, autre rendez-vous annoncé : le forum Climate chance, organisé en septembre 2016 à Nantes.
A chaque COP, sur la période 2016-2020, une réunion de Haut niveau sera organisée avec des représentants des Etats, d'organisations internationales mais aussi des acteurs non-étatiques. Deux "champions" seront nommés par les Nations unies pour animer ces travaux. Elle sera l'occasion "de dresser le bilan des progrès réalisés et [de] prendre en compte les activités, initiatives et coalitions volontaires, nouvelles ou renforcées", précise une des décisions de l'accord. En attendant, les acteurs sont invités à enregistrer leurs initiatives et engagements sur le portail Nazca. Enfin, autre rendez-vous annoncé : le forum Climate chance, organisé en septembre 2016 à Nantes.
Mais cette dynamique devrait surtout permettre d'accélérer l'atteinte des objectifs qui ont été fixés ce 12 décembre, voire de les dépasser. Et surtout, de ne pas attendre 2020, date d'entrée en vigueur de l'accord, pour agir. A condition que ce mouvement ne s'essouffle pas, et que les engagements soient transformés en actes.
Des engagements pour accélérer l'atteinte des objectifs
Un mois avant l'ouverture de la COP, le secrétariat général de la Convention cadre des Nations unies sur le changement climatique (Ccnucc) alertait les Etats : les engagements nationaux pour le climat (INDC) ne permettent pas d'être sur une trajectoire limitant la hausse des températures à 2°C. Une décision, rattachée à l'accord et adoptée samedi, "note avec préoccupation" que le compte n'y est pas et que "des efforts de réduction des émissions beaucoup plus importants" seront nécessaires.
"Il y a un gap entre les INDC et l'objectif de 2°C, et encore plus avec celui de 1,5 °C. Les acteurs non-étatiques peuvent jouer un rôle en renforçant les actions d'atténuation", estime Ronan Dantec, porte-parole de l'organisation mondiale des villes et chef de file des acteurs non-étatiques.
Une analyse partagée par Lukas Hermville, chercheur à l'institut Wuppertal : "Le processus des INDC a permis d'accélérer les actions des Etats et la mise en place d'agendas politiques dans certains pays, mais cela n'est pas suffisant".
En additionnant les INDC, il y aurait, selon les estimations de la Fondation Nicolas Hulot (FNH), 15 GteCO2 émises en trop en 2030. Or, en marge de la COP, 700 maires se sont engagés à réduire leur empreinte carbone de 3,7 Gt, le potentiel des engagements des grandes entreprises dans le cadre de l'Agenda des solutions Lima-Paris est estimé entre 2,7 et 3,1 Gt… "Mais attention à ne pas additionner ces engagements avec ceux des Etats, cela peut les concrétiser ou les accélérer, mais pas s'y ajouter", prévient Matthieu Orphelin, porte-parole de FNH. De nombreux acteurs appellent à construire une méthodologie pour pouvoir prendre en compte ces engagements, les suivre et les évaluer.
Les Etats devront pousser la dynamique
Mais pour que ces engagements se concrétisent, les acteurs doivent recevoir les bons signaux. Le premier, envoyé par l'adoption de l'accord de Paris, est primordial. "Cela va imposer une norme : 2°C, qui guidera les Etats, mais aussi les comportements de tous les acteurs, analyse Lukas Hermville, du Wuppertal institute. Car finalement, ce sont les systèmes socio-économiques qui doivent changer". Le fait d'inscrire l'idéal de 1,5°C dans l'accord envoie un message encore plus fort : "Beaucoup d'acteurs privés ont compris qu'être plus ambitieux était une question de compétitivité", estime le directeur du fonds de pension Erafp.
Mais cet élan ne sera hélas pas suffisant : "Nous avons besoin que cette ambition soit traduite aux échelons nationaux", avertit Sandrine Dixson-Declève, directrice du Corporate Leaders Group. L'attentisme pourrait être de mise… et notamment si l'engagement financier des Etats ne se concrétise pas. "Amenez les milliards, nous amènerons les trillions", lançait Nigel Topping, directeur général de We mean business, coalition qui rassemble quelque 500 entreprises et investisseurs.
"Nous nous félicitons de la présence de chapitres très opérationnels pour renforcer l'action sans tarder, par exemple pour la période 2015-2020, avec des dispositifs d'expertise et d'échange auxquels nous collaborerons activement", a déclaré de son côté Ronan Dantec, lors de la session de fermeture de la COP 21. Selon lui, l'accord a créé le cadre pour que "chacun fasse sa part". En revanche, il a souligné, comme le secteur privé, le nécessaire engagement financier des Etats et le besoin de flécher ces milliards vers les territoires : "Sans approche territoriale, nous ne tiendrons aucun des objectifs que la communauté internationale se fixe ce soir, sur l'adaptation comme sur l'atténuation", a-t-il averti. Une décision adoptée samedi encourage les Etats "à œuvrer étroitement avec les entités non parties, afin de favoriser le renforcement des activités d'atténuation et d'adaptation"…
Rédactrice en chef adjointe
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