Après deux années de controverses et des manifestations marquées par
la mort de Rémi Fraisse le 26 octobre 2014, le projet initial de grand
barrage à Sivens a été abandonné par l'Etat qui va ouvrir des
discussions pour une retenue d'eau moins ambitieuse.
L'arrêté
d'abandon de la retenue d'eau de Sivens prévoyant l'abrogation de la
déclaration d'intérêt général du projet a été signé jeudi, veille de
Noël, par le préfet du Tarn et son collègue du Tarn et Garonne. Cet
arrêté est susceptible d'un recours devant le tribunal administratif de
Toulouse, précise le texte.
"C'est un joli cadeau de Noël pour les
Tarnais", a réagi à l'AFP le président socialiste du Tarn, Thierry
Carcenac, pour lequel cette signature va permettre à l'Etat "de
dédommager le département" conformément au vote de son assemblée du 11
décembre.
L'accord transactionnel porte sur une compensation de
3,4 millions d'euros sur l'abandon du projet: 2,1 ME pour les dépenses
en pure perte et 1,3 ME pour réhabiliter la zone humide.
Le
barrage de Sivens a suscité dès son origine une vive contestation. La
zone a été occupée et a été à l'origine de manifestations avec des
heurts lors desquels le militant écologiste Rémi Fraisse a été tué par
une grenade offensive lancée par un gendarme. L'enquête est toujours en
cours.
L'officialisation de cet abandon, pourtant annoncé depuis
mars dernier, a été critiqué par le sénateur DVD du Tarn et Garonne,
François Bonhomme, lequel avait révélé sur Twitter la signature "en
catimini" de l'Etat. Il a dénoncé un "gâchis", une "capitulation" et un
"Noël de la lâcheté".
"Ce sont des gens qui ne connaissent rien
au dossier et qui s'expriment pour faire monter la mayonnaise", lui a
rétorqué le président de l'assemblée départementale et collègue au sénat
M. Carcenac.
Cet arrêté va permettre au contraire d'engager les
discussions sur la nouvelle retenue d'eau qui va s'inscrire "dans l'un
des premiers projets de territoire" voulus par la ministre de
l'Environnement Ségolène Royal, a relevé M. Carcenac.
- "Sivens light" -
Pour
le sénateur, le gouvernement a prévu une méthode de concertation.
Cependant, il a rappelé qu'un "choix a déjà été arrêté" et le "besoin
d'eau" pour l'agriculture a été reconnu" par les experts du ministère.
"Il
reste le volume de la retenue à déterminer. Ce sera fait en fonction du
besoin des agriculteurs", a assuré M. Carcenac, soulignant que le
nouveau projet "pour être conforme aux directives européennes" doit
prévoir "une continuité écologique du ruisseau". Ce n'était pas le cas
de l'ancien.
L'arrêté "ne remet pas en cause le projet de Sivens",
a déclaré à l'AFP Xavier Beulin, président de la FNSEA. Pour lui, il
s'agit seulement d'un "recalibrage du projet" initial et la profession
"attend la réalisation de cet ouvrage pour des questions agricoles et de
salubrité".
Surnommée le "Sivens light", la nouvelle retenue
pourrait être construite en amont et devrait représenter la moitié de
l'ancien projet.
Cette nouvelle version est déjà fortement
contestée. José Bové, député européen écologiste préconise ainsi
"plusieurs retenues avec des petits lacs collinaires", "une meilleure
utilisation des retenues existantes dans la zone" ou de revoir les types
de cultures car "il va y avoir une raréfaction de l'eau".
Le chef
de file EELV du prochain conseil régional Midi Pyrénées, Gérard Onesta,
souhaite "un débat serein" et réclame avant toute décision une "vraie
réflexion de fonds", notamment sur le type d'agriculture qui doit être
pratiqué.
Selon M. Onesta, l'accord "de nouvelle gouvernance"
qu'il vient de signer avec la future présidente de la région, la PS
Carole Delga permettra d'étudier toutes les hypothèses et pourrait
amener à organiser une consultation de la population.
Enfin, Ben
Lefetey, porte-parole du Collectif Testet, qui regroupe des opposants,
trouve "le nouveau projet est tout aussi aberrant que l'ancien".
Privilégiant
la "mise en place d'autres alternatives", ce leader de l'opposition
souhaite d'abord que le TA de Toulouse reconnaisse "clairement
l'illégalité" de la déclaration d'utilité publique et de la dérogation
sur les espèces, deux aspects non pris en compte, selon lui, par le
récent arrêté. Mais de prévenir aussi: "s'il y a volonté de passer en
force, on s’opposera", prévient-il.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire