Un chiffre cristallise les débats sur les financements climat, ou plutôt une promesse, formulée par les pays développés en 2009 et confirmée en 2010 : mobiliser conjointement 100 milliards de dollars par an d’ici à 2020 pour aider les pays en développement à faire face au dérèglement climatique. Mais, jusqu’à présent, aucun état des lieux n’avait permis de mesurer l’effort consenti par les pays riches sur la route des 100 milliards.
C’est dire si l’estimation proposée par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) est attendue avec impatience. Elle fait état de 61,8 milliards de dollars de financement climat Nord-Sud en 2014, selon le rapport sur « Le financement climat en 2013-2014 et l’objectif des 100 milliards », publié mercredi 7 octobre, dont Le Monde s’est procuré une copie. Toujours selon les calculs des analystes de l’OCDE, qui se sont appuyés sur l’expertise du think tank Climate Policy Initiative, les flux agrégés en 2013 ne représentaient que 52,2 milliards de dollars.Ce document de soixante pages, qui détaille la nature des capitaux mobilisés (publics et privés, bilatéraux et multilatéraux) et la méthodologie retenue par les experts, a été rendu public à Lima, où se tiennent cette semaine les assemblées annuelles du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale, à l’occasion d’une réunion ministérielle sur les finances du climat. Il arrive à point nommé pour éclairer les débats des ministres des finances, qui tenteront au Pérou d’avancer sur cet épineux dossier, à moins de deux mois de la conférence de Paris sur le climat (COP21).
Double signal
Réalisé à la demande expresse de la France et du Pérou (le Pérou assure actuellement la présidence de la COP, à laquelle la France lui succédera le 30 novembre) et dans des délais de quelques mois, « le rapport donne toutes les satisfactions souhaitées », assure Michel Sapin. « Le chiffre ne fait pas fuir ceux qui ont besoin de ces financements et n’ont donc pas de raison de se désespérer, estime le ministre des finances. Il ne fait pas fuir non plus ceux qui vont avoir à augmenter leurs efforts, puisque l’écart entre 61,8 et 100 milliards, d’ici à 2020, n’est pas hors de portée. »Ce chiffrage, « encourageant » pour le ministre français, envoie un double signal, en direction des pays en développement, dans l’attente de sources financières nouvelles, mais aussi en direction des pays industrialisés, conscients que la promesse faite en 2009 lors de la COP de Copenhague engage leur crédibilité dans les négociations en cours en vue d’un accord à Paris pour contenir le réchauffement sous le seuil des deux degrés.
Mais l’annonce des 61,8 milliards dissimule une réalité plus complexe, et peut-être moins encourageante. L’estimation de l’OCDE révèle « un réel déficit sur l’adaptation », les actions menées pour limiter les impacts du changement climatique, réagit Romain Benicchio, d’Oxfam International, pour qui « le rapport indique que seulement 16 % des financements sont destinés à l’adaptation des populations au changement climatique. Le message qui ressort de ce rapport de l’OCDE est plutôt clair : les pays et les communautés les plus vulnérables sont encore les grands perdants des financements climat ».
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