vendredi 1 janvier 2016

Sivens: abandon définitif du projet du grand barrage

Après deux années de controverses et des manifestations marquées par la mort de Rémi Fraisse le 26 octobre 2014, le projet initial de grand barrage à Sivens a été abandonné par l'Etat qui va ouvrir des discussions pour une retenue d'eau moins ambitieuse.
L'arrêté d'abandon de la retenue d'eau de Sivens prévoyant l'abrogation de la déclaration d'intérêt général du projet a été signé jeudi, veille de Noël, par le préfet du Tarn et son collègue du Tarn et Garonne. Cet arrêté est susceptible d'un recours devant le tribunal administratif de Toulouse, précise le texte.
"C'est un joli cadeau de Noël pour les Tarnais", a réagi à l'AFP le président socialiste du Tarn, Thierry Carcenac, pour lequel cette signature va permettre à l'Etat "de dédommager le département" conformément au vote de son assemblée du 11 décembre.
L'accord transactionnel porte sur une compensation de 3,4 millions d'euros sur l'abandon du projet: 2,1 ME pour les dépenses en pure perte et 1,3 ME pour réhabiliter la zone humide.
Le barrage de Sivens a suscité dès son origine une vive contestation. La zone a été occupée et a été à l'origine de manifestations avec des heurts lors desquels le militant écologiste Rémi Fraisse a été tué par une grenade offensive lancée par un gendarme. L'enquête est toujours en cours.
L'officialisation de cet abandon, pourtant annoncé depuis mars dernier, a été critiqué par le sénateur DVD du Tarn et Garonne, François Bonhomme, lequel avait révélé sur Twitter la signature "en catimini" de l'Etat. Il a dénoncé un "gâchis", une "capitulation" et un "Noël de la lâcheté".
"Ce sont des gens qui ne connaissent rien au dossier et qui s'expriment pour faire monter la mayonnaise", lui a rétorqué le président de l'assemblée départementale et collègue au sénat M. Carcenac.
Cet arrêté va permettre au contraire d'engager les discussions sur la nouvelle retenue d'eau qui va s'inscrire "dans l'un des premiers projets de territoire" voulus par la ministre de l'Environnement Ségolène Royal, a relevé M. Carcenac.
- "Sivens light" -
Pour le sénateur, le gouvernement a prévu une méthode de concertation. Cependant, il a rappelé qu'un "choix a déjà été arrêté" et le "besoin d'eau" pour l'agriculture a été reconnu" par les experts du ministère.
"Il reste le volume de la retenue à déterminer. Ce sera fait en fonction du besoin des agriculteurs", a assuré M. Carcenac, soulignant que le nouveau projet "pour être conforme aux directives européennes" doit prévoir "une continuité écologique du ruisseau". Ce n'était pas le cas de l'ancien.
L'arrêté "ne remet pas en cause le projet de Sivens", a déclaré à l'AFP Xavier Beulin, président de la FNSEA. Pour lui, il s'agit seulement d'un "recalibrage du projet" initial et la profession "attend la réalisation de cet ouvrage pour des questions agricoles et de salubrité".
Surnommée le "Sivens light", la nouvelle retenue pourrait être construite en amont et devrait représenter la moitié de l'ancien projet.
Cette nouvelle version est déjà fortement contestée. José Bové, député européen écologiste préconise ainsi "plusieurs retenues avec des petits lacs collinaires", "une meilleure utilisation des retenues existantes dans la zone" ou de revoir les types de cultures car "il va y avoir une raréfaction de l'eau".
Le chef de file EELV du prochain conseil régional Midi Pyrénées, Gérard Onesta, souhaite "un débat serein" et réclame avant toute décision une "vraie réflexion de fonds", notamment sur le type d'agriculture qui doit être pratiqué.
Selon M. Onesta, l'accord "de nouvelle gouvernance" qu'il vient de signer avec la future présidente de la région, la PS Carole Delga permettra d'étudier toutes les hypothèses et pourrait amener à organiser une consultation de la population.
Enfin, Ben Lefetey, porte-parole du Collectif Testet, qui regroupe des opposants, trouve "le nouveau projet est tout aussi aberrant que l'ancien".
Privilégiant la "mise en place d'autres alternatives", ce leader de l'opposition souhaite d'abord que le TA de Toulouse reconnaisse "clairement l'illégalité" de la déclaration d'utilité publique et de la dérogation sur les espèces, deux aspects non pris en compte, selon lui, par le récent arrêté. Mais de prévenir aussi: "s'il y a volonté de passer en force, on s’opposera", prévient-il.

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