Des scientifiques ont mis en garde mardi à Bonn contre le cercle
vicieux que provoquerait, pour le réchauffement climatique, un dégel du
permafrost, des sols gelés en permanence qui emprisonnent des milliards
de tonnes de gaz à effet de serre (GES).
«Il y a 1.500 milliards
de tonnes de gaz à effet de serre gelé et emprisonné dans le
permafrost», a averti la chercheuse Susan Natali du Woods Hole Research
Center, en marge des négociations menées à Bonn pour préparer la
conférence sur le climat à Paris.
Ce volume, accumulé depuis
plusieurs milliers d'années, est «environ deux fois plus important que
celui présent dans l'atmosphère», a-t-elle souligné devant la presse.
«Vous
pouvez donc imaginer que, quand le permafrost dégèle et qu'une partie,
même faible, de ce gaz à effet de serre est libérée dans l'atmosphère,
cela peut entraîner une augmentation importante des émissions globales»
de GES, a-t-elle poursuivi.
Les émissions résultant du dégel du
permafrost, sous forme de dioxyde de carbone ou de méthane, accélèrent
le réchauffement climatique, qui lui-même accélère la fonte du
permafrost, a expliqué Mme Natali, décrivant ce cercle vicieux.
«Selon
nos estimations, 130 à 160 gigatonnes de GES pourraient être libérées
dans l'atmosphère d'ici à 2100» du fait de ce dégel, a indiqué Mme
Natali.
Les zones de permafrost couvrent environ 25% des terres de
l'hémisphère Nord. D'ici à la fin du siècle, elles devraient diminuer
de 30 à 70%, selon les émissions de gaz à effet de serre.
«Dans
les scénarios de faible émission, nous prédisons une perte de 30%», un
chiffre qui pourra grimper à 70% dans les scénarios les plus noirs, a
indiqué la chercheuse, coauteur d'une étude parue dans la revue Nature
en avril.
L'estimation la plus basse suppose une réduction
drastique des émissions, afin d'atteindre l'objectif de limiter le
réchauffement à 2° que s'est fixé la communauté internationale.
L'estimation la plus haute suppose que les émissions ne sont pas
contrôlées.
La conférence de Paris tentera en décembre de parvenir
à un accord pour rester sous 2°. Les pays doivent annoncer d'ici là
leurs objectifs de réduction d'émissions de GES.
«Les actions que
nous menons maintenant sur nos émissions dues aux énergies fossiles
auront un impact important», a souligné Mme Natali. «Nous savons que les
fuites de GES du permafrost seront importantes et irréversibles» et
qu'elles «doivent être prises en compte si nous voulons atteindre nos
objectifs en matière d'émissions».
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