OCEANS Le domaine maritime français, le deuxième plus grand du monde, s’est officiellement étendu lundi de 500.000 kilomètres carrés…
C’est arrivé très discrètement : les frontières de la France
se sont étendues lundi de 500.000 kilomètres carrés. Non, nos armées n’ont pas envahi un malheureux voisin : en fait, c’est sous l’eau que ça se passe, comme
20 Minutes
va vous l’expliquer avec l’aide de l’océanographe Benoît Loubrieu, l’un
des responsables auprès de l’Ifremer du programme français d’extension
du plateau continental (Extraplac).
Qu’est-ce que c’est qu’un plateau continental ?
Quand on parle frontières maritimes, on pense généralement aux
Zones économiques exclusives
(ZEE), qui disent quel pays a le droit de naviguer et de pêcher à tel
ou tel endroit. Le plateau continental, lui, n’a rien à voir avec ces
considérations diplomatico-économiques. Il « n’inclut que le sol et le
sous-sol marin, définit Benoît Loubrieu. Il est délimité en respectant
des critères de continuité du relief sous-marin et de géologie. »
Comment un pays peut décider de l’étendre ?
A la base, chaque pays ayant une façade maritime a une ZEE s’étendant
à 200 milles marins au-delà de ses côtes. La France, grâce à
l’outre-mer, a le 2e plus grand domaine maritime, derrière les
Etats-Unis. Les ZEE sont bloquées à cette frontière de 200 milles, mais
«
la Convention internationale du droit de la mer
prévoit pour les pays signataires la possibilité de solliciter une
extension du plateau continental au-delà des 200 milles marins »,
explique l’océanographe de l’Ifremer. Si un Etat peut prouver
scientifiquement la prolongation naturelle de ses terres émergées,
une commission d’experts rattachée à l’ONU
émet un avis favorable à sa demande : il y aura alors dans l’ordre les
terres émergées, puis 200 milles marins de ZEE, puis le plateau
continental étendu jusqu’à 350 milles marins. C’est ce qui s’est passé
pour la France lundi.
A quoi ça sert ?
On l’a vu, un plateau continental, ce n’est que du sol et du
sous-sol. Pas question d’en profiter pour pêcher plus loin ou surveiller
de plus grandes zones. Alors, quel intérêt ? « C’est une extension de
souveraineté, indique Benoît Loubrieu, et d’un territoire pour lequel on
a des droits et des devoirs, comme celui de gérer l’éventuelle
exploitation des ressources présentes dans le sous-sol marin ». Sauf que
ces ressources sont largement inaccessibles : « Ces extensions au-delà
des 200 milles marins se situent loin des côtes, dans des espaces très
profonds, encore peu explorés », précise l’expert. Et donc encore moins
exploités. Pour l’instant, on est surtout dans le symbole.
(c) Ifremer/Géosciences Marines/Extraplac
Alors à quoi bon ?
Ces 500.000 km2 gagnés lundi ne servent donc à rien ? Sans aller
jusque-là, Benoît Loubrieu admet qu’on est « dans le fait de prendre
acte ». Et de respecter des délais : « La France devait faire ses
demandes à temps, plus tard ça n’aurait plus été possible, indique
l’océanographe. Et elle avait fait le choix politique que des demandes
d’extension seraient faites sur l’ensemble des zones pour lesquelles
l’argumentation est possible ». D’ailleurs, d’autres demandes françaises
sont en cours de traitement. Si elles étaient toutes validées, la
France
pourrait augmenter son domaine maritime d’un million de km2. Ce n’est peut-être pas très utile, mais ça a le mérite d’être impressionnant.
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