La coordinatrice du Réseau action climat espère que les négociations au Bourget tiendront compte de l'engagement que devraient prendre 700 maires du monde entier ce vendredi à «soutenir des objectifs ambitieux en faveur du climat tel que la transition vers une énergie à 100% renouvelable d’ici à 2050».
Les
maires aussi déclarent leur flamme au climat. Ce vendredi, en marge des
négociations officielles de la COP 21, près de 700 élus locaux du monde
entier sont réunis à l’Hôtel de Ville de Paris pour le sommet des élus
locaux pour le climat, coprésidé par la maire de la capitale, Anne
Hidalgo, et l’envoyé spécial du secrétaire général des Nations unies
pour les villes et les changements climatiques et ancien maire de New
York, Michael Bloomberg. Une «mobilisation sans précédent», à l’issue de
laquelle ces élus doivent signer une déclaration politique commune, qui
sera délivrée au Bourget lors de l’«Action Day» de samedi.
Selon la dernière version du document, les «maires, gouverneurs, présidents de régions et autres responsables de pouvoirs locaux», devraient s’engager collectivement, entre autres, à «réduire de 3,7 gigatonnes les émissions annuelles de gaz à effet de serre dans les zones urbaines d’ici 2030 (soit
30% de la différence prévue entre les engagements nationaux actuels et
les niveaux d’émissions recommandés par la communauté scientifique pour
limiter le réchauffement à 2 °C, ndlr)». Surtout, ils s’engageraient à «soutenir
des objectifs ambitieux en faveur du climat tels que la transition vers
une énergie 100% renouvelable sur nos territoires ou une réduction de
80% des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050».
De quoi réjouir les ONG environnementales, qui plaident
depuis longtemps pour un tel objectif «100% renouvelable». Entretien
avec Anne Bringault, en charge des questions de transition énergétique
au Réseau action climat et au CLER-Réseau pour la transition
énergétique.
Pourquoi cet engagement en faveur du 100% énergies renouvelables en 2050 est-il important à vos yeux ?
«Alors que les négociations internationales dans le cadre
de la COP 21 patinent et que les États peinent à trouver un consensus
pour rester en dessous des 2 °C de réchauffement de la planète, cet
engagement de plus de 600 maires du monde entier à soutenir la
transition vers une énergie 100% renouvelable sur leurs territoires
d’ici à 2050 va donner une impulsion nouvelle aux négociateurs
internationaux. Si des centaines de villes s’engagent vers ce cap clair,
c’est un message fort adressé aux États : les collectivités locales
sont prêtes à aller vers le 100% énergies renouvelables, en menant en
parallèle des politiques ambitieuses de réduction de leur consommation
d’énergie. Aux États maintenant d’entendre cet engagement des
collectivités et de fixer également dans l’accord de Paris un cap 100%
énergies renouvelables.»
Une telle déclaration, qui revient à acter un soutien de ces maires à la sortie des fossiles et du nucléaire d’ici 2050, était impensable il y a quelques mois encore…
Les acteurs des solutions du passé – les énergies fossiles,
le nucléaire - sont plus puissants aujourd’hui que les acteurs des
solutions d’avenir - les économies d’énergie et les renouvelables –, et,
comme dans toute transition, ils freinent toute évolution du système.
Ils ont tout fait pour convaincre le public et les politiques qu’il
n’était pas possible d’aller vers un autre modèle. Ce qui a changé ces
derniers mois, c’est que de nombreuses études ont démontré non seulement
la faisabilité technique d’un avenir 100% énergies renouvelables, mais
également l’intérêt que cela apporte en termes de créations d’emplois,
de réduction du déficit de notre commerce extérieur et de baisse des
coûts, avec des filières comme l’éolien et le photovoltaïque, qui sont
de plus en plus compétitives. En parallèle, de nombreuses collectivités à
travers le monde (voir le site http://www.go100re.net/map/)
ont commencé à s’engager vers le 100% énergies renouvelables, à
échanger entre elles et à mieux définir ce concept. Par exemple, pour
une ville très dense comme Paris, s’engager vers le 100% énergies
renouvelables, c’est évaluer ses capacités en termes d’économies
d’énergie, puis étudier le périmètre nécessaire autour de Paris pour
produire les énergies renouvelables nécessaires. C’est donc créer de
nouvelles solidarités entre des villes grandes consommatrices et des
territoires ruraux davantage producteurs, c’est la possibilité pour des
villes d’investir dans des projets de production d’énergie renouvelable
dans des territoires voisins.
Vous avez parlé des Etats. Pourquoi ne prennent-ils pas ce genre d’engagements ?
Certains Etats, comme le Costa Rica, ont décidé de se
diriger vers le 100% énergies renouvelables. Mais ils sont encore peu
nombreux. Les lobbies des entreprises de production d’énergie sont
encore plus puissants au niveau national. Passer d’un système de
production d’énergie très centralisé et concentré entre les mains de
quelques entreprises vers un système plus décentralisé où les outils de
production appartiennent en partie aux collectivités et aux citoyens (en
Allemagne, plus de 50% des capacités de production éolienne
appartiennent à des particuliers et à des agriculteurs) est un
changement profond. Pour lever les résistances face à cette mutation,
une anticipation et un accompagnement des transitions professionnelles
sont indispensables.
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