La vie sur Terre a une histoire longue et mouvementée. Depuis 600 millions d’années, elle a connu
cinq extinctions massives des espèces.
Et la sixième n’est pas loin. Gilles Bœuf, président du Muséum
d’histoire naturelle, s’intéresse depuis plusieurs années à la question.
A la veille de sa
conférence «La biodiversité à l’épreuve du climat», qui a lieu mercredi à la Maison des océans, il répond aux questions de
20 Minutes.
C’est quoi, une disparition massive des espèces?
C’est la disparition des trois quarts des espèces vivantes, sur terre
et en mer, sur un temps très court. Un temps géologique très court: au
moins 100.000 ans. Or, des travaux récents, qui ont suivi 2.000 espèces
de mammifères, d’oiseaux et de poissons sur quarante ans, ont montré
qu’on a perdu plus de 50% des individus de ces populations. Donc ce
n’est pas tant les espèces qui disparaissent que les stocks d’individus
de ces espèces. Et si on continue de voir ces stocks s’épuiser autant,
on se dirige bel et bien vers une sixième crise d’extinction.
A quel rythme s’y dirige-t-on?
Si on ne change rien, mais je suis optimiste et je me refuse à croire
cela, il sera difficile de vivre après les années 2040, où il n’y
aurait plus de pêche, plus d’abeilles, un dérèglement climatique...
Quelles sont les causes de la sixième crise d’extinction?
Il y a quatre grandes causes: la destruction de la nature et la
pollution, la surexploitation des ressources vivantes, la dissémination
des espèces (avec les cas célèbres du lapin, de la jacinthe, ou du
frelon
et du charançon récemment) et le dérèglement climatique.
Pourquoi parle-t-on davantage de la menace pesant sur le climat que sur la biodiversité?
Pour l’instant, le dérèglement climatique fait plus peur car les gens
le voient. Ils n’imaginent pas que la disparition des espèces peut être
aussi impactante. Mais l’humain ne peut se passer de la
biodiversité! Dans une région de Chine, les abeilles ont disparu, et
sans abeilles il n’y a pas de légumes ou de fruits,
du coup c’est l’homme qui les remplace, à grand coût.
A l’échelle du monde, une telle situation coûterait 180 milliards
d’euros par an. La fin de la pêche, aussi, aurait des conséquences
économiques dramatiques. Et je ne parle pas du simple bien-être de
l’humanité si elle devait être privée de biodiversité!
Il y a déjà eu cinq crises d’extinction. En quoi une sixième serait-elle grave?
Au niveau des temps qui nous concernent, l’humain risquerait de
partir avec. La Terre, notre planète, elle, s’en fiche. C’est nous,
humains, qui allons beaucoup souffrir si nous ne changeons pas.
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