Développer les énergies renouvelables en assurant les consommateurs
de l'origine «verte» de leur électricité ? C'était ce que promettait le
mécanisme des garanties d'origine qui peine à décoller en France, malgré
le militantisme de certains acteurs et la volonté d'entreprises
d'afficher une image respectueuse de l'environnement.
Instauré au
milieu des années 2000 en France, ce système permet à un consommateur de
s'assurer qu'au moment où il utilise du courant, une quantité
équivalente produite à partir d'énergies renouvelables (solaire, éolien,
hydraulique...) est injectée dans le réseau électrique.
Et il est organisé autour d'un registre national, géré depuis 2013 par la société Powernext.
Lorsqu'un
producteur met en service une centrale éolienne par exemple, il fait
enregistrer ce nouveau moyen de production d'électricité d'origine
renouvelable, et émet des garanties d'origine pour chaque mégawattheure
produit.
Les fournisseurs d'électricité, ou même certains
consommateurs (comme des entreprises), ont ensuite la possibilité
d'acheter ces garanties et ainsi d'apposer l'étiquette «verte» à leur
courant.
Plusieurs fournisseurs, comme EDF ou Direct Energie, proposent ainsi des abonnements certifiés 100% renouvelable.
- Consommateurs 'militants' -
Au
final, le client paye un peu plus cher son électricité, «en moyenne 2 à
3% plus cher que les tarifs réglementés», selon Jean-Marc Dubreuil,
associé chez Wattvalue, une société qui fait l'intermédiaire entre les
producteurs d'électricité renouvelable et les acheteurs de garanties.
«En
2014, un volume proche de 20 térawattheures de garantie d'origine a été
émis», indique Richard Kantz directeur des ventes et de la
communication de Powernext, pour une production totale d'électricité
renouvelable un peu supérieure à 100 TWh (102,5 TWh en 2013).
«Jusqu'ici,
le système a surtout séduit des consommateurs militants», explique
Adrien Maurin, chargé d'approvisionnement d'Enercoop, coopérative
spécialisée dans l'électricité verte.
Enercoop compte ainsi
18.000 clients particuliers mais aussi 2.000 professionnels, surtout des
collectivités, des associations et des entreprises de l'économie
sociale et solidaire.
L'offre «Equilibre» d'EDF ne compte elle que des clients professionnels.
Car, au-delà du pur intérêt environnemental, certaines entreprises ont aussi trouvé là le moyen de «verdir» leur image.
En
novembre dernier, Bolloré s'est par exemple associé à la Compagnie
nationale du Rhône (CNR) pour l'approvisionnement de ses voitures
d'autopartage Bluecub à Bordeaux.
Ainsi, quand un automobiliste
met en recharge sa Bluecub, au même moment quelque part sur le Rhône, la
CNR injecte dans le réseau électrique national du courant produit par
un de ses barrages.
Le groupe, qui procède de la même manière pour
sa flotte à Paris et à Lyon a par le passé été épinglé pour avoir mis
en avant le caractère écologique de ses voitures, alors que l'essentiel
de l'électricité produite en France provient du nucléaire.
Autres
exemples: McDonald's achète des garanties d'origine pour l'électricité
utilisée dans ses restaurants en France. Nature et Découvertes fait la
même chose pour ses magasins dans l'Hexagone.
- Peu d'attrait pour les producteurs -
Mais
si le but de ce mécanisme était de développer les sources de production
d'énergies renouvelables en stimulant une demande pour du courant vert,
les résultats ne sont pas vraiment au rendez-vous.
Car pour un
producteur, les garanties d'origines ne sont pas cumulables avec les
tarifs d'achat bonifiés de l'électricité dont bénéficient aussi les
renouvelables.
«Le marché des garanties d'origine est aujourd'hui
déficient. Elles s'échangent autour d'un euro le MWh donc vendre une
garantie d'origine pour un producteur d'énergie renouvelable n'offre pas
réellement de revenu supplémentaire», regrette Adrien Maurin, chargé
d'approvisionnement d'Enercoop, coopérative spécialisée dans
l'électricité verte.
Par ailleurs, il reste une «question
d'acceptabilité de la part du consommateur: vouloir payer plus cher son
énergie parce qu'elle est renouvelable», estime Richard Kantz.
La
fin des tarifs d'achat bonifiés prévue dans la loi de transition
énergétique et qui seront remplacés par une combinaison associant le
prix de marché de l'électricité et une prime, peut-elle changer la
donne?
Comme le mécanisme ne pourra pas se superposer non plus au
futur système de rémunération, «il restera un marché de niche en France,
même si l'intérêt est là», juge Jean-Marc Dubreuil de Wattvalue.
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