mardi 13 janvier 2015

L'électricité garantie verte a encore du mal à séduire les consommateurs

Développer les énergies renouvelables en assurant les consommateurs de l'origine «verte» de leur électricité ? C'était ce que promettait le mécanisme des garanties d'origine qui peine à décoller en France, malgré le militantisme de certains acteurs et la volonté d'entreprises d'afficher une image respectueuse de l'environnement.
Instauré au milieu des années 2000 en France, ce système permet à un consommateur de s'assurer qu'au moment où il utilise du courant, une quantité équivalente produite à partir d'énergies renouvelables (solaire, éolien, hydraulique...) est injectée dans le réseau électrique.
Et il est organisé autour d'un registre national, géré depuis 2013 par la société Powernext.
Lorsqu'un producteur met en service une centrale éolienne par exemple, il fait enregistrer ce nouveau moyen de production d'électricité d'origine renouvelable, et émet des garanties d'origine pour chaque mégawattheure produit.
Les fournisseurs d'électricité, ou même certains consommateurs (comme des entreprises), ont ensuite la possibilité d'acheter ces garanties et ainsi d'apposer l'étiquette «verte» à leur courant.
Plusieurs fournisseurs, comme EDF ou Direct Energie, proposent ainsi des abonnements certifiés 100% renouvelable.
- Consommateurs 'militants' -
Au final, le client paye un peu plus cher son électricité, «en moyenne 2 à 3% plus cher que les tarifs réglementés», selon Jean-Marc Dubreuil, associé chez Wattvalue, une société qui fait l'intermédiaire entre les producteurs d'électricité renouvelable et les acheteurs de garanties.
«En 2014, un volume proche de 20 térawattheures de garantie d'origine a été émis», indique Richard Kantz directeur des ventes et de la communication de Powernext, pour une production totale d'électricité renouvelable un peu supérieure à 100 TWh (102,5 TWh en 2013).
«Jusqu'ici, le système a surtout séduit des consommateurs militants», explique Adrien Maurin, chargé d'approvisionnement d'Enercoop, coopérative spécialisée dans l'électricité verte.
Enercoop compte ainsi 18.000 clients particuliers mais aussi 2.000 professionnels, surtout des collectivités, des associations et des entreprises de l'économie sociale et solidaire.
L'offre «Equilibre» d'EDF ne compte elle que des clients professionnels.
Car, au-delà du pur intérêt environnemental, certaines entreprises ont aussi trouvé là le moyen de «verdir» leur image.
En novembre dernier, Bolloré s'est par exemple associé à la Compagnie nationale du Rhône (CNR) pour l'approvisionnement de ses voitures d'autopartage Bluecub à Bordeaux.
Ainsi, quand un automobiliste met en recharge sa Bluecub, au même moment quelque part sur le Rhône, la CNR injecte dans le réseau électrique national du courant produit par un de ses barrages.
Le groupe, qui procède de la même manière pour sa flotte à Paris et à Lyon a par le passé été épinglé pour avoir mis en avant le caractère écologique de ses voitures, alors que l'essentiel de l'électricité produite en France provient du nucléaire.
Autres exemples: McDonald's achète des garanties d'origine pour l'électricité utilisée dans ses restaurants en France. Nature et Découvertes fait la même chose pour ses magasins dans l'Hexagone.
- Peu d'attrait pour les producteurs -
Mais si le but de ce mécanisme était de développer les sources de production d'énergies renouvelables en stimulant une demande pour du courant vert, les résultats ne sont pas vraiment au rendez-vous.
Car pour un producteur, les garanties d'origines ne sont pas cumulables avec les tarifs d'achat bonifiés de l'électricité dont bénéficient aussi les renouvelables.
«Le marché des garanties d'origine est aujourd'hui déficient. Elles s'échangent autour d'un euro le MWh donc vendre une garantie d'origine pour un producteur d'énergie renouvelable n'offre pas réellement de revenu supplémentaire», regrette Adrien Maurin, chargé d'approvisionnement d'Enercoop, coopérative spécialisée dans l'électricité verte.
Par ailleurs, il reste une «question d'acceptabilité de la part du consommateur: vouloir payer plus cher son énergie parce qu'elle est renouvelable», estime Richard Kantz.
La fin des tarifs d'achat bonifiés prévue dans la loi de transition énergétique et qui seront remplacés par une combinaison associant le prix de marché de l'électricité et une prime, peut-elle changer la donne?
Comme le mécanisme ne pourra pas se superposer non plus au futur système de rémunération, «il restera un marché de niche en France, même si l'intérêt est là», juge Jean-Marc Dubreuil de Wattvalue.

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