Plus
une semaine ne passe sans que de nouvelles pierres soient déposées dans
le jardin des néonicotinoïdes, ces insecticides suspectés d’être un
élément déterminant dans le déclin récent des abeilles domestiques, des
insectes pollinisateurs et des oiseaux. Après la publication, début
avril, d’un rapport des académies des sciences européennes critiquant sévèrement les « impacts négatifs sévères » de ces molécules sur l’environnement, la revue Nature publie,
jeudi 23 avril, deux nouvelles études qui assombrissent encore le bilan
de ces pesticides introduits sur le marché au milieu des années 1990.
La première, conduite par Geraldine Wright et Sébastien Kessler (université de Newcastle, Royaume-Uni) a consisté à tester la capacité des abeilles domestiques (Apis mellifera) et des bourdons (Bombus terrestris) à éviter spontanément les plantes traitées aux néonicotinoïdes. Le résultat est stupéfiant : non seulement ces insectes ne sont pas repoussés par ces substances insecticides, mais ils sont attirés par elles.
La conséquence de cette situation paradoxale – les insectes sont attirés par des substances qui les tuent – est que ces deux espèces de pollinisateurs, parmi les plus importantes pour le fonctionnement des systèmes agricoles et des écosystèmes, sont dans le milieu naturel plus exposées à ces produits que généralement escompté.
En revanche, les colonies d’abeilles domestiques suivies semblent avoir été peu touchées, mais les auteurs préviennent que la puissance statistique de leur étude ne leur permet pas de détecter, sur les ruches d’Apis mellifera, des baisses démographiques de moins de 20 %.
Ces nouveaux travaux sont publiés alors que la Commission européenne doit réexaminer, fin 2015, le moratoire mis en place en décembre 2013 sur certains usages de trois néonicotinoïdes et qu’en France, un amendement à la loi sur la biodiversité imposant leur interdiction totale à partir de janvier 2016 a été adopté en première lecture.
La première, conduite par Geraldine Wright et Sébastien Kessler (université de Newcastle, Royaume-Uni) a consisté à tester la capacité des abeilles domestiques (Apis mellifera) et des bourdons (Bombus terrestris) à éviter spontanément les plantes traitées aux néonicotinoïdes. Le résultat est stupéfiant : non seulement ces insectes ne sont pas repoussés par ces substances insecticides, mais ils sont attirés par elles.
Effets sur le système nerveux central
« Lorsque des butineuses affamées pouvaient choisir entre une solution sucrée traitée à un néonicotinoïde et une non traitée, aucune des deux espèces n’a évité la nourriture traitée, détaillent Nigel Raine (université de Guelph, Canada) et Richard Gill (Imperial College, Royaume-Uni), dans un commentaire publié par Nature. De manière surprenante, les insectes préfèrent en fait les solutions traitées avec l’imidaclopride et le thiaméthoxame [deux des néonicotinoïdes les plus répandus]. » Les auteurs de l’étude suggèrent que cet effet étonnant est lié à l’action pharmacologique de ces insecticides sur le système nerveux central – un peu comme certaines substances exercent une attirance sur l’homme tout en lui causant des dommages (nicotine, etc.). En outre, les tests menés en laboratoire suggèrent que les bourdons sont plus sensibles à cet effet que les abeilles domestiques.La conséquence de cette situation paradoxale – les insectes sont attirés par des substances qui les tuent – est que ces deux espèces de pollinisateurs, parmi les plus importantes pour le fonctionnement des systèmes agricoles et des écosystèmes, sont dans le milieu naturel plus exposées à ces produits que généralement escompté.
Ces
nouveaux travaux sont publiés alors que la Commission européenne doit
réexaminer, fin 2015, le moratoire mis en place en décembre 2013 sur
certains usages de trois néonicotinoïdes
Avec quelles conséquences ? C’est l’objet de la seconde étude publiée par Nature,
menée par des chercheurs suédois conduits par Maj Rundölf (université
de Lund, Suède). Les auteurs ont inclus 16 champs de colza dans leur
expérience, tous étant situés dans le sud de la Suède et tous faisant
partie intégrante de paysages semblables. La moitié des champs analysés
étaient traités avec un néonicotinoïde courant (la clothianidine) couplé
à de la cyfluthrine (un insecticide de la famille des pyréthroïdes) ;
l’autre moitié n’avait reçu que la cyfluthrine pour traitement
insecticide. Maj Rundölf et ses collègues ont ensuite suivi l’état des
colonies de bourdons et d’abeilles domestiques dans ces champs, ainsi
que celui d’une abeille solitaire (Osmia bicornis).Réexamen du moratoire européen
Les auteurs observent d’abord que l’abondance de bourdons et d’abeilles solitaires est réduite de moitié dans les champs ayant reçu un traitement systémique à base de clothianidine (ou les semences ont été enrobées du principe actif) par rapport aux champs témoins, exempts du néonicotinoïde. Les colonies de bourdons montrent en outre un succès reproductif très inférieur dans les champs traités. Et les abeilles solitaires nées à proximité de ces derniers ne reviennent jamais y nicher, contrairement à celles originaires des champs témoins.En revanche, les colonies d’abeilles domestiques suivies semblent avoir été peu touchées, mais les auteurs préviennent que la puissance statistique de leur étude ne leur permet pas de détecter, sur les ruches d’Apis mellifera, des baisses démographiques de moins de 20 %.
Ces nouveaux travaux sont publiés alors que la Commission européenne doit réexaminer, fin 2015, le moratoire mis en place en décembre 2013 sur certains usages de trois néonicotinoïdes et qu’en France, un amendement à la loi sur la biodiversité imposant leur interdiction totale à partir de janvier 2016 a été adopté en première lecture.
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Stéphane Foucart
Journaliste au Monde
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