La politique forestière française n'a ni «stratégie», ni «pilote» et
accorde «trop» de soutiens au bois énergie, selon un rapport du Sénat
dévoilé mercredi, qui formule des recommandations pour tirer un meilleur
parti économique de l'une des plus grandes forêts d'Europe.
Ce
rapport est basé sur une enquête demandée fin 2013 à la Cour des comptes
par la commission des Finances du Sénat. La filière bois compte 440.000
emplois, mais représente 10% du déficit total de la balance
commerciale.
«La politique forestière est sans stratégie, sans
pilote, sans résultats», a déclaré mercredi le sénateur UMP Alain
Houpert, l'un des rapporteurs spéciaux, lors d'une présentation à la
presse.
Cinq ministères sont concernés par le sujet, mais «chacun
met de son côté sa politique en oeuvre» sans concertation, sur fond de
«mosaïque décisionnelle» comprenant «une pléthore de structures
publiques» ainsi que dix organisations professionnelles, a-t-il résumé.
«Nous
souhaitons une clarification et un chef de file», en l’occurrence le
ministère de l'Agriculture, a demandé l'autre rapporteur, Yannick Botrel
(PS).
Le «contrat de filière», signé en décembre, n'est qu'une
«avancée très timide» dans un domaine où «les avancées viennent
davantage du terrain», estime M. Houpert.
Le contrat a été signé
par les ministères de l’Économie, de l’Écologie, de l'Agriculture et du
Logement, avec les industriels, les communes forestières et l'ONF.
Pour
les sénateurs, le modèle économique de la filière est celui d'un «pays
en développement», avec de «graves déséquilibres» provoqués par
l'exportation de bois brut à l'étranger et l'importation de produits
transformés à plus forte valeur ajoutée.
Avec 910 millions d'euros
par an, les soutiens publics sont «nombreux» mais «peu cohérents», et
«trop marqués» en faveur de la filière du bois énergie, qui en capte
plus d'un tiers, créant des conflits d'usage dans certaines régions.
En
revanche, «les soutiens à l'usage du bois dans la construction sont
modestes, alors qu'il s'agit du principal débouché en France pour le
bois matériau et ses dérivés», note le rapport.
«Cela ne signifie
pas qu'il ne faut pas installer de chaudières à bois, mais il faut
veiller à bien dimensionner les installations par rapport au contexte
régional», a souligné M. Botrel.
Dans certaines zones, les industriels peinent à récupérer du bois pour faire du charbon ou pour la papeterie.
Les
sénateurs recommandent notamment d'accroître la production de bois de
l'Office national des forêts (ONF), d'augmenter la proportion d'arbres
résineux (plus demandés par l'industrie), et d'instaurer un dispositif
pour limiter les exportations de bois brut.
La forêt française
(outre-mer exclus) est la quatrième forêt de l'Union européenne en
surface, avec 17 millions d'hectares, mais la troisième si l'on tient
compte du volume de bois. Elle produit 85 millions de mètres cubes de
bois par an, mais seule la moitié est effectivement récoltée
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