Inquiets, mais pas résignés. Tels apparaissent les Français face au changement climatique, selon un sondage réalisé par l'institut Ipsos entre le 19 et le 26 janvier, auprès d'un échantillon de 995 personnes, pour le compte de l'agence Havas-Paris.
Premier constat, le climato-scepticisme n'est plus de mise. Les Français, dont 89 % ont « l'impression » que le climat a changé au cours des vingt dernières années, sont 80 % à penser que ce changement est « dû en grande partie à l'activité humaine », 20 % seulement considérant qu'il est « dû en grande partie à des facteurs naturels ».Plus de trois sur quatre se déclarent personnellement « très inquiets » (20 %) ou « plutôt inquiets » (57 %) des conséquences possibles. Ils disent avoir déjà constaté personnellement certains de ces impacts, notamment des inondations plus fréquentes, des tempêtes plus fréquentes ou plus intenses, ou encore une augmentation de la température moyenne.
Que redoutent-ils le plus ? « Si le changement climatique se confirme », les conséquences en France seront selon eux « très importantes » ou « plutôt importantes » dans plusieurs domaines : d'abord pour la faune et la flore (90 %), puis pour les dépenses publiques (84 %) et, en troisième lieu, la santé (80 %).
SENTIMENT D'« URGENCE »
Face à ces inquiétudes, ils éprouvent majoritairement un sentiment d'« urgence » (52 %), mais aussi une nécessité de « mobilisation » (30 %). L'une des leçons les plus frappantes de cette étude est en effet que le fatalisme n'est pas à l'ordre du jour. Près de neuf sondés sur dix (88 %) souscrivent à l'idée que « nous pouvons trouver des solutions novatrices pour réduire l'impact du changement climatique ». Un peu plus de sept sur dix (71 %) ne s'en remettent pas à la seule collectivité pour réagir, mais pensent qu'ils « peuvent agir personnellement à leur niveau ».
Dans ce contexte, la conférence mondiale sur le climat (COP 21) qui se tiendra en décembre 2015 à Paris est jugée comme un rendez-vous important. Fait en lui-même symptomatique, 57 % ont « entendu parler » de cette conférence, même si seulement 22 % « savent précisément de quoi il s'agit ».
Qu'en espèrent-ils ? Bien qu'un sondé sur trois seulement juge que les précédentes conférences climatiques ont été « utiles », ils sont 93 % à estimer que l'organisation de cette manifestation à Paris est une « très bonne » ou « plutôt bonne chose » pour « sensibiliser les Français à la lutte contre le changement climatique ». Et presque autant à penser que cette conférence sera bénéfique « pour favoriser la signature d'un accord entre tous les pays participants ».
ENTREPRISES FRANÇAISES « PAS ASSEZ MOBILISÉES »
Le sondage s'est aussi attaché à la perception du rôle des entreprises face à l'enjeu climatique. Avec des résultats contrastés. Pour 65 % des personnes interrogées, les entreprises françaises « ne sont pas mobilisées dans la lutte contre le changement climatique ». Pour autant, 77 % sont d'avis que les grandes entreprises « peuvent agir de manière efficace » dans ce domaine, et presque autant (71 %) que les petites et moyennes entreprises peuvent faire de même.
Qu'attendent-ils concrètement de ces entreprises ? Avant tout qu'elles « réduisent l'impact de leur activité sur le changement climatique » (68 %) et, subsidiairement, qu'elles « innovent et permettent ainsi à leurs clients-consommateurs de s'adapter aux effets du changement climatique ». Les entreprises devraient ainsi donner la priorité à la lutte contre le gaspillage des matières premières (63 %), à la réduction de leur consommation d'énergie ou d'eau (44 %) et à la conception de « produits et solutions innovants » ayant moins d'impact sur le climat (44 %).
Pour inciter les entreprises à adopter des pratiques vertueuses, les sondés misent principalement sur « les réglementations édictées par les pouvoirs publics » (40 %), ainsi que la « pression » des clients ou consommateurs (32 %). Mais ils ne sont que 3 % à croire que « la pression de leurs salariés » puisse être d'une quelconque efficacité.
« Ce sondage fait ressortir un vrai changement chez les Français, commente Coralie France-Savin, chargée de l'expertise sur le climat à Havas-Paris. Ils pensent aujourd'hui – ce qui n'était pas le cas par le passé – qu'ils peuvent agir à leur niveau contre le changement climatique. Ils attendent des entreprises, qui sont perçues à la fois comme causes et comme solutions au problème climatique, qu'elles ouvrent à la voie pour leur permettre d'adapter leur comportement de consommateur. »
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Pierre Le Hir
Journaliste au Monde
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