samedi 21 février 2015

L'agriculture devra avoir sa place dans l'accord de Paris sur le climat

L'accord contre le changement climatique qui doit être conclu en décembre à Paris, sous l'égide de l'ONU, devra intégrer l'agriculture pour assurer l'adhésion des pays les plus réticents et garantir la sécurité alimentaire de tous.
Clôturant vendredi un Forum international sur le thème «Agriculture et changement climatique», à la veille du 52e Salon de l'Agriculture, qui se tient jusqu'au 1er mars à Paris, le président François Hollande a appelé à «engager une double révolution verte», pour nourrir une humanité de plus en plus nombreuse et urbaine, tout en contrant le réchauffement climatique.
L’Agriculture, ont rappelé les intervenants, scientifiques et politiques, dont les ministres de l'Agriculture ou du développement rural d'une vingtaine de pays, est soumise à cette double pression alors que la population mondiale approchera les dix milliards en 2050 (dont 70% vivront dans les villes).
Aujourd'hui plus de 800 millions d'humains ne mangent pas à leur faim. Et les dérèglements du climat perceptibles affectent déjà les rendements.
Les zones les plus touchées, en Afrique sahélienne notamment, sont aussi celles où la croissance démographique sera la plus forte comme l'a rappelé le ministre malien, Bokary Treta. «La désertification, nous la vivons déjà au quotidien! Et nous ne serons pas en mesure de nourrir la population au vu de (son) accroissement prévisible». Les deux-tiers de son territoire reçoivent déjà moins de 200 mm d'eau par an.
«La production agricole doit changer et s'adapter» a martelé M. Hollande, proposant deux axes de travail pour la conférence de Paris: la conclusion d'un «mécanisme d'assurance récolte» qui garantira les producteurs «et des investissements pour limiter les émissions de gaz à effet de serre» responsables du réchauffement de l'atmosphère. En moyenne, l'agriculture contribue pour 20% du total des émissions mondiales.

- Lutte contre le réchauffement ou sécurité alimentaire -

«Les Etats devront prendre leur part à ces efforts» a-t-il estimé en demandant la définition d'une «stratégie de recherche» pour améliorer la performance économique et écologique des exploitations.
«Il n'y aura pas de progrès sans recherche et sans une mobilisation scientifique exceptionnelle. (...)L'enjeu du climat est aussi politique» a insisté le chef de l'Etat, citant les déplacements de populations et les tensions sur les terres agricoles, «l'un des sujets les plus graves de ce siècle».
Le directeur général de la FAO, l'Organisation des Nations unies pour l'agriculture et l'alimentation, José Graziano da Silva a fait ainsi valoir que pour éviter l'exode rural auquel sont déjà condamnées des centaines de milliers de personnes, notamment en Méditerranée, «il est important de fixer les populations sur leurs territoires en leur garantissant une vie meilleure».
Bien sûr, a reconnu Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères qui présidera les travaux des 195 pays contre le réchauffement, «il existe une crainte dans certains pays que cette lutte contre le réchauffement porte atteinte à la sécurité alimentaire».
Aussi, juge-t-il qu'«un accord à Paris ne sera bon que s'il est bon pour la sécurité alimentaire».
Mieux, son collègue de l'Agriculture Stéphane Le Foll y voit un enjeu et «un élément de l'accord car beaucoup de pays y sont intéressés» et que l'agriculture «permettra de mobiliser des pays qui, sinon, ne le seraient pas».
Au fil des débats, ce secteur est aussi apparu comme porteur de solutions puisqu'il a «la mission de nourrir le monde» mais aussi une «responsabilité dans l'utilisation des ressources durables» de la planète, a insisté Xavier Beulin, président de la puissante FNSEA, le syndicat agricole majoritaire.
«Sa spécificité doit être prise en compte» a-t-il complété, en remarquant qu'il fallait désormais sortir d'un modèle qui pensait «qu'une partie du monde nourrira l'autre. Non, on a besoin de tous».
L'ambassadrice Climat de la France Laurence Tubiana s'est «réjouie de voir l'agriculture revenir dans les discussions après avoir pendant longtemps été laissée de côté», notamment en raison de la difficulté à mesurer les émissions qu'elle dégage. «Mais aussi parce qu'il y avait un enjeu de développement derrière cette discussion» .
Vice-président du groupe des experts climat de l'ONU (Giec), Jean Jouzel a une nouvelle fois rappelé vendredi «l'urgence» d'agir, alors que les pratiques agricoles émettent surtout du méthane et des oxydes d'azote, des gaz au pouvoir 30 fois et 300 fois plus réchauffant que le CO2.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire