L'accord contre le changement climatique qui doit être conclu en
décembre à Paris, sous l'égide de l'ONU, devra intégrer l'agriculture
pour assurer l'adhésion des pays les plus réticents et garantir la
sécurité alimentaire de tous.
Clôturant vendredi un Forum
international sur le thème «Agriculture et changement climatique», à la
veille du 52e Salon de l'Agriculture, qui se tient jusqu'au 1er mars à
Paris, le président François Hollande a appelé à «engager une double
révolution verte», pour nourrir une humanité de plus en plus nombreuse
et urbaine, tout en contrant le réchauffement climatique.
L’Agriculture,
ont rappelé les intervenants, scientifiques et politiques, dont les
ministres de l'Agriculture ou du développement rural d'une vingtaine de
pays, est soumise à cette double pression alors que la population
mondiale approchera les dix milliards en 2050 (dont 70% vivront dans les
villes).
Aujourd'hui plus de 800 millions d'humains ne mangent
pas à leur faim. Et les dérèglements du climat perceptibles affectent
déjà les rendements.
Les zones les plus touchées, en Afrique
sahélienne notamment, sont aussi celles où la croissance démographique
sera la plus forte comme l'a rappelé le ministre malien, Bokary Treta.
«La désertification, nous la vivons déjà au quotidien! Et nous ne serons
pas en mesure de nourrir la population au vu de (son) accroissement
prévisible». Les deux-tiers de son territoire reçoivent déjà moins de
200 mm d'eau par an.
«La production agricole doit changer et
s'adapter» a martelé M. Hollande, proposant deux axes de travail pour la
conférence de Paris: la conclusion d'un «mécanisme d'assurance
récolte» qui garantira les producteurs «et des investissements pour
limiter les émissions de gaz à effet de serre» responsables du
réchauffement de l'atmosphère. En moyenne, l'agriculture contribue pour
20% du total des émissions mondiales.
- Lutte contre le réchauffement ou sécurité alimentaire -
«Les
Etats devront prendre leur part à ces efforts» a-t-il estimé en
demandant la définition d'une «stratégie de recherche» pour améliorer la
performance économique et écologique des exploitations.
«Il n'y
aura pas de progrès sans recherche et sans une mobilisation scientifique
exceptionnelle. (...)L'enjeu du climat est aussi politique» a insisté
le chef de l'Etat, citant les déplacements de populations et les
tensions sur les terres agricoles, «l'un des sujets les plus graves de
ce siècle».
Le directeur général de la FAO, l'Organisation des
Nations unies pour l'agriculture et l'alimentation, José Graziano da
Silva a fait ainsi valoir que pour éviter l'exode rural auquel sont déjà
condamnées des centaines de milliers de personnes, notamment en
Méditerranée, «il est important de fixer les populations sur leurs
territoires en leur garantissant une vie meilleure».
Bien sûr, a
reconnu Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères qui présidera
les travaux des 195 pays contre le réchauffement, «il existe une crainte
dans certains pays que cette lutte contre le réchauffement porte
atteinte à la sécurité alimentaire».
Aussi, juge-t-il qu'«un accord à Paris ne sera bon que s'il est bon pour la sécurité alimentaire».
Mieux,
son collègue de l'Agriculture Stéphane Le Foll y voit un enjeu et «un
élément de l'accord car beaucoup de pays y sont intéressés» et que
l'agriculture «permettra de mobiliser des pays qui, sinon, ne le
seraient pas».
Au fil des débats, ce secteur est aussi apparu
comme porteur de solutions puisqu'il a «la mission de nourrir le monde»
mais aussi une «responsabilité dans l'utilisation des ressources
durables» de la planète, a insisté Xavier Beulin, président de la
puissante FNSEA, le syndicat agricole majoritaire.
«Sa spécificité
doit être prise en compte» a-t-il complété, en remarquant qu'il fallait
désormais sortir d'un modèle qui pensait «qu'une partie du monde
nourrira l'autre. Non, on a besoin de tous».
L'ambassadrice Climat
de la France Laurence Tubiana s'est «réjouie de voir l'agriculture
revenir dans les discussions après avoir pendant longtemps été laissée
de côté», notamment en raison de la difficulté à mesurer les émissions
qu'elle dégage. «Mais aussi parce qu'il y avait un enjeu de
développement derrière cette discussion» .
Vice-président du
groupe des experts climat de l'ONU (Giec), Jean Jouzel a une nouvelle
fois rappelé vendredi «l'urgence» d'agir, alors que les pratiques
agricoles émettent surtout du méthane et des oxydes d'azote, des gaz au
pouvoir 30 fois et 300 fois plus réchauffant que le CO2.
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