http://www.consoglobe.com/darvwin-levi-straus-eloge-diversite-cg
De Darwin à Levi-Strauss est un livre qui a le don de remettre les idées en place sur la place réelle de l’homme dans l’histoire de notre planète. Sa thèse centrale fait froid dans les dos : l’homme est le plus grand prédateur de l’histoire et il a déclenché la sixième grande extinction des espèces de l’histoire de la vie sur Terre.
L’homme impose sa domination par la destruction
Homo Sapiens a évolué et prospéré au fil de l’histoire en s’imposant à son environnement. Il a laissé sur la planète une empreinte indélébile. Après avoir supprimé les grands mammifères, nos ancêtres Sapiens ont éradiqué les autres espèces Homo : Neandertal, Homo habilis, Homo rudolfensis ou Denisova ne sont plus là pour s’en souvenir. Le travail d’extinction massive, ces «Tristes tropiques », clin d’oeil appuyé au célèbre livre de Levi-Strauss, sont encore en oeuvre de nos jours.
L’homme au coeur d’un désastre écologique
Pire, comme l’explique Pascal Picq, l’auteur paléo-anthropologue de cet ouvrage éclairant, n’a jamais exercé une influence prédatrice aussi forte sur son environnement.
L’homme, depuis 600 000 ans, exerce une énorme pression écologique : seul grand mammifère à manger de tout (à part l’ours), il a besoin d’énormément d’énergie pour faire fonctionner son gros cerveau (20% des besoins énergétique).
Les besoins énergétiques de l’homme
Pour nourrir 1 homme, il faut pour une année :- L’équivalent de 300 truites,
- 90 000 grenouilles pour alimenter toutes ces truites,
- Des millions de criquets pour alimenter toutes ces grenouilles,
- 1000 tonnes d’herbes pour alimenter ces criquets.On comprend mieux pourquoi le prélèvement végétal de l’homme n’a jamais été aussi important : un quart de tout ce qui pousse sur Terre est exploité par l’humanité pour son alimentation, ses élevages, ses industries….
Plus d’hommes, moins de diversité écologique
L’explosion démographique qu’on connaît depuis les années 1950 épuise la planète qui s’essouffle. Comme chaque année, on « fête » le jour du dépassement : au mois d’août, nous avons consommé plus de nourriture que ce que nous produisons en une année.
Le bouleversement écologique qui en découle est largement accentué par la disparition des espèces : celle-ci est accélérée par l’homme qui se focalise sur très peu de variétés de plantes et de graines à cultiver ou d’espèces de vaches, cochons, moutons, … à élever. Or à chaque fois qu’une espèce disparaît, c’est tout l’écosystème et les autres êtres vivants qui doivent retrouver un nouvel équilibre. En un mot, l’homme travaille puissamment à créer son propre isolement sur la planète. Au-fur et à mesure qu’on abandonne ou perd une espèce (de vache, de maïs, de haricot,….), on accentue la fragilité des écosystèmes.
Levi-Strauss et Darwin ont tous les deux pensé et réfléchi à la dévastation environnementale et culturelle et dénonçaient déjà à leur époque les explorations et l’expansion des populations européennes.
Après la cinquième grande extinction d’espèces, celle des dinosaures au Cétacé, la sixième est en cours actuellement.
Les six grandes extinctions de masse au cours de l’histoire de la vie sur Terre, se sont produites entre -500 millions d’années (ordovicien) et -65 Ma (crétacé). On considère que la biodiversité actuelle représente au plus 1% de toutes les espèces qui ont vécu dans le passé. Cela signifie que 99% des espèces se sont éteintes :
- fin du Cambrien (-500 Ma) ;
- fin de l’Ordovicien (-440 Ma) ;
- fin du Dévonien (-365 Ma) ;
- fin du Permien (-250 Ma) ;
- fin du Trias (-200 Ma) ;
- fin du Crétacé (-65 Ma) : Extinction des dinosaures non aviens.
- fin de l’antrophocène et du pétrocène : de nos jours
La 6ème extinction massive d’espèces
Comme le souligne Pascal Picq, l’homme est parfois inconscient de cette évolution : ainsi les progrès de la médecine se font au détriment des virus ou de tout un tas d’agents pathogènes, qui eux aussi contribuent à l’aseptisation générale et à l’appauvrissement de la variété écologique planétaire. Mais c’est surtout le travail réducteur de l’agriculture industrielle moderne qui est en cause : les grandes firmes agro-chimiques ou agroalimentaires, en imposant des variétés qui sont adoptées de manière uniforme par les agriculteurs du monde entier, appauvrissent le capital génétique de l’humanité ; parfois sans le vouloir ni s’en rendre compte.
La conclusion de ce constat est relativement simple : l’homme, en se croyant au centre de tout, en oubliant la variété de la création, travaille à sa propre fin. En ne préservant pas la diversité des espèces et la biodiversité, il appauvrit le capital qu’il lègue à ses enfants car « la diversité est la condition nécessaire au mécanisme de l’évolution », ce qu’il appelle l’impératif « de la descendance avec évolution » pour la survie.
L’impact sur notre priorité devrait être clair : la priorité n’est pas de ressusciter des mammouths ou des néandertaliens, ni d’inventer une vie plus longue avec les manipulations génétiques ou le transhumanisme, mais bien de préserver ce qu’on a, la biodiversité naturelle dans toute sa diversité….
L’impact sur notre priorité devrait être clair : la priorité n’est pas de ressusciter des mammouths ou des néandertaliens, ni d’inventer une vie plus longue avec les manipulations génétiques ou le transhumanisme, mais bien de préserver ce qu’on a, la biodiversité naturelle dans toute sa diversité….
Ce plaidoyer écologique est une puissante incitation à respecter ladiversité culturelle. Car pour préserver notre succès évolutif, il faut préserver les diversités naturelles, sauvages ou domestiques, ethniques ou culturelles. On pourrait le traduire par : pour nous sauver nous-mêmes, respectons les autres.
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L’hypothèse de la 6ème extinction de masse est-elle crédible ?
Un article de 2011 dans la revue Nature (1) a étudié l’hypothèse d’une 6ème grande extinction massive d’espèce dans l’histoire de la Terre. Pour juger, un des critères est la vitesse de disparition des espèces par rapport au rythme naturel normal (basé sur l’étude des fossiles, c’est-à-dire par rapport aux vitesses naturelles d’extinction en l’absence d’influence humaine). La vitesse d’extinction constatée de nos jours est anormalement élevée, mais on ne peut pas conclure pour l’instant que la 6ème extinction s’est déjà produite. Elle est en cours.
Le nombre d’espèces disparues de nos jours est encore loin d’atteindre celui qu’on a connu lors des 5 extinctions de masse précédentes.Seuls quelques pourcents des 8,7 millions d’espècesvivantes de la Terre se sont pour l’instant éteintes. Pour Barnosky et al. la conclusion est la suivante : sur le ryhtme actuel de disparition, si toutes les espèces actuellement listées comme étant menacées (au sens de l’IUCN) disparaissent au cours des 100 prochaines années, nous pourrions atteindre l’équivalent de la 6ème extinction d’ici 240 ans. D’autres publications scientifiques (Pereira et al) montrent que le rythme actuel est supérieur à celui mesuré par Barnovosky.
« Au cours de notre vie, des centaines d’espèces pourraient disparaître en raison de nos propres actions« , tonne Julia Marton-Lefèvre, directrice de l’UICN.
- 188 mammifères se trouvent dans la catégorie la plus grave, « en danger critique d’extinction«
- Globalement, un mammifère sur quatre, 1 oiseau sur 8 , un tiers des amphibiens et 70% des plantes sont en danger.
- Au total, 785 espèces sont déjà éteintes et 65 survivent seulement en captivité ou à l’état domestique, selon l’UICN.
- Selon les experts, le rythme actuel d’extinction est de 100 à 1.000 fois supérieur à ce qu’il a été en moyenne sur des centaines de millions d’années.
De Darwin à Lévi-Strauss L’homme et la diversité en danger
Charles Darwin a découvert la baie de Rio le 3 avril 1832 sur le Beagle (périple de 1831/1836) et Claude Lévi-Strauss découvre la baie de Rio en cargo en 1935. « Tristes tropiques » paraît en 1955, un siècle après le « Voyage d’un naturaliste autour du monde »en 1839 de Charles Darwin.
Dans ce nouveau livre, Pascal Picq imagine que les deux savants qui repartent à l’aventure, à la redécouverte du nouveau monde. Nouveau monde que Darwin et Lévi-Strauss seraient bien en peine de reconnaître, tant la diversité naturelle et la diversité culturelle ont été atteintes. À mesure que des espèces disparaissent et que des cultures et des langues meurent, c’est notre avenir et celui de la Terre qui sont compromis. Darwin et Lévi-Strauss nous avaient avertis. Pourquoi ne les a-t-on pas compris ? 22,90 € chez Odile Jacob
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