Du fait de son exposition aux éléments, le Vanuatu, balayé la semaine
dernière par un puissant cyclone, constitue un précieux laboratoire des
«bouleversements écologiques», explique le géophysicien Sylvain Todman,
conseiller du gouvernement local.
Q: Les petits pays insulaires
du Pacifique souffrent directement de l'impact du réchauffement
climatique. Qu'en est-il au Vanuatu?
R: Je préfère parler de
bouleversements écologiques que de réchauffement climatique. Ces
bouleversements ont peut-être un impact sur la fréquence des aléas
naturels, et c'est ce qu'on essaie de déterminer. Le Vanuatu est un
véritable laboratoire de recherche, le plus exposé au monde à ces aléas.
Q: En quoi est-il plus exposé?
R:
Le pays se situe dans une «warm pool» (piscine chaude) où le
réchauffement se fait plus sentir car les mers y sont déjà plus chaudes
qu'ailleurs. Sur la ceinture de feu du Pacifique, il subit des
mouvements de plaques tectoniques très importants de l'ordre d'une
dizaine de centimètres par an. On y observe les mouvements verticaux les
plus importants au monde. On y surveille aussi six volcans actifs dont
celui d'Ambrym où il y a quelques mois une fissure éruptive avec coulée
de lave s'est ouverte sur cinq kilomètres.
Q: Le Vanuatu est aussi sujet à une forte activité sismique?
R:
On observe un à deux séismes de magnitude 7 par an, il y a un tsunami
majeur tous les dix ans et un cyclone extrême tous les 30 ans. La
croissance démographique et économique importante augmente la
vulnérabilité du pays et de ses habitants à tous ces risques.
Q:
Le cyclone Pam a été d'une violence inouïe, pourtant le bilan encore
provisoire au niveau humain semble contenu. Comment l'expliquer?
R:
Le pays était très bien préparé. Le Vanuatu est un pays en voie de
développement mais il a des capacités. Il y a un an et demi un centre
d'alerte a été créé. Il rassemble notamment dans un même bâtiment le
bureau des catastrophes naturelles, le département de la météo et le
ministère du changement climatique afin de faciliter les communications
en cas de crise.
Le centre fonctionne sept jours sur sept 24
heures sur 24. Il a été mis à l'épreuve des faits pour la première fois
avec Pam. Le cyclone était en formation pendant une semaine au nord du
Vanuatu, on a donc eu le temps de mener une opération d'information
auprès de toutes les communautés.
Q: Les populations du Pacifique savent également avoir les bons réflexes face aux cyclones?
R:
Oui, les savoirs traditionnels sont une autre explication. Dans les
communautés mélanésiennes, les gens se sont réfugiés dans les
«nakamals». Ce sont des espaces communautaires dont l'architecture
résiste à ces phénomènes: les poteaux sont fortement enfoncés dans le
sol, les murs et la toiture (en végétaux) sont très bas. On m'a rapporté
qu'à Tanna (île du sud de l'archipel), une famille avait trouvé la mort
parce que sa maison en dur lui est tombée dessus, tandis que les autres
villageois dans le «nakamal» s'en sont sortis.
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