jeudi 5 mars 2015

Sols pollués et santé

Ce dossier thématique présente les activités de l’Institut de veille sanitaire dans le domaine des sols pollués et de la santé. Il contient une introduction générale expliquant la problématique, puis présente les rapports, documents et outils utiles pour les épidémiologistes de terrain et les études réalisées. Il propose également des liens vers les sites internet de nos principaux partenaires qui approfondissent et/ou complètent les sujets abordés. 


Sols pollués et santé : une préoccupation de santé publique

Les préoccupations liées à l'état des sols en France et leur impact potentiel sur la santé se sont renforcées ces dernières dizaines d’années en lien avec les nombreux arrêts d'exploitations et l’accroissement de la demande foncière. La découverte de pollutions oubliées a nécessité de développer des réponses adaptées à ces enjeux qui sont au croisement des préoccupations de santé publique, de protection de l'environnement et d'utilisation durable de l'espace. A ce jour, le nombre de sites recensés qui ont connu par le passé une activité industrielle ou de service potentiellement polluante dépasse le nombre de 230 000, dont près de 4 000 font l’objet de mesures de surveillance, de diagnostic ou de réhabilitation.

Quelles sont les sources de contamination des sols ?

Plusieurs sources peuvent être à l’origine de la contamination des sols :
  • naturelles, liées à la nature géologique des roches ;
  • humaines, associées notamment à des exploitations industrielles actuelles ou anciennes.

Quelles sont les substances polluantes habituellement retrouvées ?

Les éléments métalliques dans les sols sont fréquemment mis en évidence : plomb, zinc, arsenic, chrome, cadmium… Ils peuvent être liés naturellement à la roche du sol ou apportés par des sources anthropiques.
Les composés organiques, principalement apportés par l’homme, sont également retrouvés dans les sols, notamment les hydrocarbures détectés dans 40 % des sites diagnostiqués dans la base de données Basol (hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), solvants halogénés comme le trichloréthylène par exemple, composés organiques volatiles (COV), etc.).

Quelles sont les différentes voies d’exposition possibles pour l’homme ?

Le sol est un milieu de l’environnement en lien étroit avec les autres milieux (eau, air). Les possibilités d’exposition sont multiples, que ce soit par ingestion ou par inhalation et les plus fréquentes sont :
  • l’ingestion de terre par les jeunes enfants, particulièrement exposés en raison de leur comportement. Lors de jeux à même le sol, ils peuvent ingérer directement de la terre déposée sur les mains ou les objets qu’ils portent à la bouche ;
  • l’ingestion de produits végétaux alimentaires cultivés sur des terres polluées ; 
  • l’ingestion d’eau, conséquence d’un transfert d’un produit présent dans le sol vers la nappe phréatique ; 
  • l’inhalation de poussières émises par les sols pollués ; 
  • l’inhalation, conséquence de la volatilisation éventuelle du polluant à partir du sol.

Quels sont les effets de la pollution des sols sur la santé humaine ?

Les populations les plus exposées aux effets de la pollution des sols sont celles présentes sur les sites ou sols pollués ou à proximité.
De nombreuses substances chimiques mesurées dans des sols pollués sont connues pour générer des effets multiples sur la santé.
Si la description d’effets sanitaires dans une population qui réside sur ou à proximité d’un site pollué est souvent possible, il est par contre difficile de déterminer si la pollution du site est bien responsable de ces effets. Au moins une raison à cela : la difficulté d’estimer l’exposition des populations aux polluants présents dans les sols, car le passage des polluants du sol dans l’organisme humain est très mal connu.
Aujourd’hui, cette exposition est estimée de plus en plus souvent par la mesure de biomarqueurs, principalement le polluant lui-même ou ses métabolites dans le sang ou dans les urines.
  • En savoir plus :
Dor F, Daniau C, Kermarec F, Empereur-Bissonnet P. Sols pollués et santé à une échelle locale : une analyse de la situation intégrant la dimension psychosociale. Note de position de l’Institut de veille sanitaire. Saint-Maurice : Institut de veille sanitaire ; 2013. 4 p.
Dor F et al. Démarche décisionnelle pour la conduite d'une étude à l'aide de biomarqueurs au sein des populations résidant sur des sols pollués. Numéro thématique. Pollution des sols : de l'exposition des populations à la santé publique. Bull Epidemiol Hebd 2008;47-48:468-70.
Legout C et al. Eléments de construction d'une relation avec les populations dans l'évaluation des risques liés à une exposition environnementale. Numéro thématique : Pollution des sols : de l'exposition des populations à la santé publique. Bull Epidemiol Hebd 2008;47-48:473-6.
Inventaire d'anciens sites industriels et activités de services (Basias), Bureau de recherches géologiques et minières : http://basias.brgm.fr/
Base de données sur les sites et sols pollués (Basol), ministère chargé de l'Environnement : http://basol.ecologie.gouv.fr/
Dor F. Pollution des sols et santé publique. Archives des maladies professionnelles et environnementales. 2006;67:40-8.
Dor F, Zmirou D. Stockage des déchets et santé publique. Synthèse et recommandations. Saint-Maurice: Institut de veille sanitaire; 2005. 40 p.
Dor F, Zmirou D.  Stockage des déchets et santé publique. Saint-Maurice: Institut de veille sanitaire; 2004. 348 p.
Mesure de la plombémie et dépistage du saturnisme. Voir : Saturnisme de l'enfant. Dossier thématique InVS.


Programme Sols pollués et santé de l’InVS

Depuis plusieurs années, les Cellules interrégionales d’épidémiologie (Cire) et le département santé environnement (DSE) de l’Institut de veille sanitaire sont régulièrement sollicités pour analyser les signalements environnementaux et sanitaires comportant une problématique de pollution des sols, et apporter une réponse de santé publique aux populations concernées.
En 2004, un groupe d’épidémiologistes de Cire animé par le DSE (réseau interCire) est créé pour partager les expériences vécues et construire un programme commun.

Objectifs

Le programme Sols pollués et santé a pour objectifs de développer ou adapter des méthodes et des outils spécifiques et d'acquérir les connaissances et les compétences nécessaires à l’amélioration des réponses aux différentes sollicitations locales (décideurs et population).
Il s’articule autour de deux thématiques principales, l’estimation de l’exposition aux polluants des sols d’une part, la compréhension du rôle des populations concernées d’autre part.
L’analyse des travaux nationaux et internationaux publiés à ce jour révèle la difficulté d’estimer l’exposition des populations aux polluants présents dans les sols, car le passage des polluants du sol dans l’organisme humain est très mal connu. La compréhension et l’objectivation de cette exposition sont donc préalables à une réponse adaptée de santé publique. Par ailleurs, dans ce contexte d’incertitude avérée de l’estimation de l’exposition, les populations locales participent de plus en plus à l’analyse et à la gestion de la situation qui les concerne. En outre, leur participation est fortement sollicitée lorsque, par exemple, des études d’exposition à l’aide de biomarqueurs nécessitant la réalisation de prélèvements de sang ou d’urine sont proposées. Le partage des connaissances, des objectifs et de la conduite d’une étude, de la restitution des résultats et de la formulation des recommandations sont autant de moments clés au cours desquels la population souhaite être impliquée.
Au-delà de ces axes de travail, la mise en réseau des Cellules interrégionales d'épidémiologie a également permis de faciliter les échanges lorsque des études locales se sont avérées nécessaires ; le partage de l’analyse des situations, des connaissances, et des modalités de mise en œuvre des protocoles en a été facilité.

Axes de travail

Le travail du réseau interCire s’articule autour de plusieurs axes :
  • identifier et catégoriser les sites et sols pollués posant problème en termes de santé publique afin d’anticiper et prévenir l’émergence de situations problématiques sur le plan sanitaire ;
  • apporter les éléments méthodologiques et de connaissances permettant d’engager la mesure de l’exposition des populations aux polluants des sols, à l’aide de marqueurs biologiques ;
  • analyser les conditions de la prise en compte des concentrations en substances liées à la géochimie des sols dans les études de santé publique sur les sites et sols pollués ;
  • proposer une démarche de caractérisation de la pollution d’un sol pour estimer l’exposition des populations concernées ;
  • comprendre l’influence de l’ingestion possible de sols dans les études sanitaires sur les sites et sols pollués et déterminer une valeur pour cette variable humaine d’exposition ;
  • prendre en compte l’implication des populations riveraines et des acteurs dans l’ensemble du processus d’investigation d’un site pollué.
Au sein de chacun de ces axes, les travaux opérationnels ont été privilégiés. Il s’agit de travaux dont les résultats permettent une application pratique et rapide sur le terrain, tels des guides méthodologiques, des conduites à tenir, des grilles d’analyse ou des recommandations de valeurs à intégrer dans les estimations de risques sanitaires.

Études locales sur des sols pollués

Les premières alertes sanitaires liées à des pollutions des sols industriels ont eu lieu au début des années 1980. Ce fut Love Canal et Woburn aux États-Unis, Montchanin en France et, plus récemment, les sites émetteurs de plomb et l’école Franklin Roosevelt à Vincennes.
En dépit d’un nombre important de situations dégradées, les études épidémiologiques réalisées ont souvent été peu démonstratives en raison, notamment, de deux écueils majeurs que sont l’estimation difficile de l’exposition des populations aux polluants présents dans les sols contaminés et la taille réduite des populations concernées lorsque l’on considère les sites séparément les uns des autres. Les interrogations restent donc fortes sur le plan sanitaire.
Pour contourner cette difficulté de la mesure de l’exposition, les travaux se sont principalement appuyés sur l’utilisation de la modélisation des transferts des polluants du sol vers les autres milieux, puis vers les populations, à travers des scénarios d’exposition plutôt majorants. Les études menées sur les sols pollués ont montré des discordances entre ce que laissent présager des concentrations de ces métaux dans les sols, les prédictions des niveaux d’exposition qui en résultent et les mesures à l’aide de biomarqueurs. C’est le cas notamment pour le chrome, l’arsenic, le plomb et les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP).
Aujourd’hui, aucune des méthodes disponibles ne permet de répondre de manière universelle. En fonction des composés impliqués et de la situation étudiée, il convient de choisir la plus appropriée d’entre elles.
De plus en plus souvent, les populations demandent des mesures biologiques, car elles souhaitent disposer d’une mesure réelle de leur exposition. Elles ont l’impression que ce type de mesures amène une réponse fiable et définitive sur les conséquences sanitaires des pollutions auxquelles elles sont soumises. Il est vrai que ces études quantifient la dose absorbée par l’organisme, mais bien souvent elles ne permettent pas de dégager la contribution des voies et des sources d’exposition, ni l’impact sur la santé.
Par ailleurs, les biomarqueurs utiles dans un contexte d’exposition aux polluants du sol n’existent que pour un nombre très limité de polluants et des valeurs de référence en population générale sont en cours de constitution en France (Enquête nationale nutrition santé par exemple). Pour autant, si elles permettent de répondre à la question de la réalité de l’exposition de la population, elles ne doivent pas apparaître comme une modalité d’intervention systématique dans la gestion sanitaire des sites et des sols pollués.
Les travaux des Cellules interrégionales d'épidémiologie (réseau interCire) ont permis de faciliter les échanges lors d’études locales. Le partage de l’analyse des situations, des connaissances et des modalités de mise en œuvre des protocoles a permis d’homogénéiser les réponses apportées par l’Institut de veille sanitaire.
Les principales études locales sur des sols pollués sont :
 

Méthodes et outils spécifiques de la pollution des sols

Le réseau interCire (Cellules interrégionales d'épidémiologie) sur la thématique des sols pollués et santé s’articule autour de travaux sur le développement de méthodes et d’outils, l’acquisition de connaissances et de compétences pour améliorer les réponses aux différentes sollicitations locales.
L’analyse des travaux nationaux et internationaux publiés à ce jour révèle la difficulté d’estimer l’exposition des populations aux polluants présents dans les sols. Les travaux permettant de mieux caractériser cette exposition sont des préalables à une réponse adaptée de santé publique.
Par ailleurs, les populations locales participent de plus en plus à l’analyse et à la gestion de la situation qui les concerne. La compréhension du contexte social dans lequel intervient l’Institut de veille sanitaire est donc également un point important.
Ainsi, le travail du groupe interCire s’articule autour des projets suivants :
Caractérisation de l’environnement :
Évaluation de l’exposition des populations :
Implication des populations :
Au sein de chacun de ces projets, les travaux opérationnels ont été privilégiés. Il s’agit de travaux dont les résultats permettent une application pratique et rapide sur le terrain, tels des guides méthodologiques, des conduites à tenir, des grilles d’analyse ou des recommandations de valeurs à intégrer dans les estimations de risques sanitaires. Ces travaux ont notamment permis de mutualiser l’expérience acquise par les différents membres du réseau interCire.
 

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